Future vedette dans l’ombre des vedettes

La Presse

Montréal, samedi 12 avril 1986

ARTS ET SPECTACLES

JEAN-PIERRE BUCOLO

photo Michel Gravel, LA PRESSE

■ Derrière les vedettes, les têtes d’affiche, il y a souvent des artistes tout aussi talentueux, compositeurs et accompagnateurs, qui sont méconnus du grand public. Ainsi en est-il pour le guitariste et compositeur Jean-Pierre Bucolo. 

Accompagnateur de Francis Cabrel comme de Renaud, il signe les musiques de quelques-unes des chansons de ces vedettes françaises. Ainsi est-ce lui qui a composé la musique de Miss Maggie.

À la veille de mener sa propre carrière, après avoir été le guitariste attitré de Gérard Lenorman, Cabrel et Renaud, c’est à Montréal, dans le cadre du spectacle de Francis Cabrel, que Bucolo a chanté pour la première fois en public la première chanson du répertoire qu’il veut se bâtir, Mourir pour elle.

« Quand t’as été habitué d’être cinq mètres derrière le chanteur, à un moment tu voudrais pousser le mec qui est devant toi », de dire Bucolo. Fermement décidé à franchir une nouvelle étape dans sa carrière, pour devenir chanteur, Bucolo a failli ne pas venir au Québec, car il voulait lâcher Cabrel. Mais il a choisi de l’accompagner dans une dernière tournée. Et avant de le perdre, Cabrel a voulu lui céder sa place sur scène, le temps d’une chanson.

D’autres devront suivre. Jean-Pierre Bucolo doit en effet se consacrer à la composition d’un microsillon qui devrait sortir à l’automne. Ce sera son deuxième, le premier paru il y a trois ans s’étant surtout mérité un « succès d’estime ». Rock et balades seront au menu.

Carrière

En devenant musicien, Bucolo, a rompu avec une longue tradition familiale. On est luthier de père en fils dans sa famille. Mais c’est un métier qui se perd. « Y avait tellement de guitares chez-nous» dit-il, que la guitare s’est vite imposée comme l’instrument dont il allait jouer, plutôt que d’en fabriquer.

Son apprentissage fut similaire à celui de la plupart des musiciens. Des rencontres ont contribué à l’évolution du guitariste. Il y a d’abord eu Jean-Michel Jarre, à l’époque simplement parolier, qui a proposé à Bucolo d’accompagner le chanteur Christophe.

« Puis, de fil en aiguille je me suis retrouvé avec Gérard Lenorman. Ensuite j’ai connu une période de travail en studio. Mais là je me sentais devenir un fonctionnaire de luxe » raconte-t-il.

« Je faisais des chansons, mais timide je les gardais pour moi. J’avais encore beaucoup à apprendre ». Survient alors sa rencontre avec Francis Cabrel, lors d’une croisière. Il l’invite à faire une tournée à l’île Maurice. Bucolo lui fait entendre ses chansons. « Et c’est le premier qui m’a incité à faire mon truc » rappelle-t-il. Pas étonnant donc,
que Cabrel lui offre son public pour faire ses débuts comme chanteur.

Autre rencontre importante, celle de Renaud, il y a trois ans. « C’était à un moment où Cabrel ne faisait rien. Alain Souchon et Renaud voulaient que je les accompagne. J’ai choisi d’aller avec Renaud, pour une tournée d’un mois ».

« C’est fort ce qu’il raconte dans ses chansons, mais Renaud n’est pas un musicien comme l’est Cabrel » dit encore Bucolo. Et c’est finalement lors d’une partie de pêche, un sport qu’aime bien Renaud, que ce dernier a demandé à Bucolo de lui proposer des musiques pour les chansons qu’il avait écrites pour l’album Mistral gagnant.

Un titre a attiré le musicien, Miss Maggie fucking blues. Écourtée et adoucie dans son titre, cette chanson allait grandement contribuer à faire connaître son compositeur, Jean-Pierre Bucolo. Ce succès arrive à point nommé pour l’artiste qui veut voler de ses propres ailes après avoir été dans l’ombre de vedettes aux styles bien différents.

A 31 ans, cheveux grisonnants et sang italien dans les veines (sa famille est de vieille souche en Sicile), Jean-Pierre Bucolo veut aujourd’hui tirer lui-même profit de son expérience et de son talent. Il devient chanteur.

  

Source : La Presse