Interview. Le bonheur est Aufray

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B.L

Lorsque vous aviez sorti «A chacun sa mer», il y a six ans, vous aviez la sensation d’être à un «carrefour» de votre vie, celui qui fédérait toutes vos chansons d’hier et celles de ce nouvel album. Où en êtes-vous aujourd’hui?

A partir de 1980, je me suis trouvé dans une situation assez rare à l’époque: je n’avais plus de maison de disques, WEA n’ayant pas renouvelé mon contrat. J’ai donc continué en produisant moi-même mes disques et j’ai découvert la réalité du marché pendant 25 ans jusqu’à la sortie de ce disque «A chacun sa mer». Et aujourd’hui, me voilà à nouveau débarrassé de ces contraintes: grâce à Johnny Hallyday qui m’a présenté à Pascal Nègre, je viens de signer chez Universal/Mercury et tout se passe très bien. Aux Vieilles Charrues, l’été 2004, j’ai chanté devant plus de 60.000 personnes!… Vous savez, le public est beaucoup plus fidèle que les médias!

On vous a vu cet été dans la presse people en compagnie de votre ami Renaud. D’où viennent ces liens d’amitié?

C’est vrai, j’ai été le seul artiste invité par Renaud chez lui. Pourquoi? Parce que plus qu’un ami, je suis sans doute un peu son frère. Nous avons beaucoup de points communs. Il m’a beaucoup aimé quand il était jeune et moi je l’ai beaucoup aimé quand il a débuté. Et quand je l’ai vu chanter pour la première fois, je suis allé lui serrer la main dans sa loge et lui dire que je l’aimais beaucoup aussi. Un pacte d’amitié fraternelle. Certes on n’est pas toujours d’accord sur le monde, sur la société, mais l’essentiel demeure et je me sens chez lui comme en famille.

Le tour de chant qui vous conduit aujourd’hui jusqu’à nous est composé de vos propres chansons mais aussi de celles de Félix Leclerc…

Pendant les dix années où j’ai chanté avant de signer mon premier disque, j’allais de cabaret en cabaret sans plan de carrière, donc sans chansons. Mon truc, c’était de gagner ma vie pour ma femme et mes deux petites filles. J’ai donc chanté des chansons qui me tombaient sous la main. En espagnol d’abord parce que mon père était remarié avec une espagnole et j’ai vécu quelques années à Madrid. Et puis des chansons de Leclerc et aussi de Brassens, un peu plus tard. Alors voilà, j’ai eu envie de remercier Leclerc, à travers l’au-delà. J’espère qu’il m’entend quelque part, entre Django et Count Basie.

Depuis cette belle émission que la télévision vous a consacrée à la rentrée, on vous offre un nouveau tracteur à l’occasion de chacun de vos concerts?

(Rires) Pour ne rien vous cacher, je n’ai jamais eu ni Ferrari ni Maserati et quand on me demande quel a été le plus beau jour de ma vie, une fois que j’ai exclu le jour de la naissance de mes enfants ou celui de mon mariage, je dis que quand j’ai vu arriver mon premier tracteur sur le chemin de ma ferme, j’ai eu le coeur qui battait très fort… J’adore le métier de la terre! Mon plus grand plaisir, enfant, c’était de conduire les boeufs l’aiguillon sur l’épaule pour les faire boire au bord du Lot. Et l’un des grands regrets de ma vie, c’est d’ailleurs de n’avoir jamais su traduire la qualité de toutes ces émotions en chanson.

Vous vous souvenez de votre premier concert à Toulouse?

Oui, c’était à la Halle aux Grains. J’ai chanté Stewball et j’ai pleuré!… Vous savez que j’ai passé 5 ans à Sorèze et quand je viens à Toulouse, je ne peux m’empêcher d’y penser… La petite gare du Pont des Demoiselles a disparu… On est en train d’effacer ma jeunesse! …Vous savez, la maison de mon papa était au bord de la ligne de chemin de fer entre Toulouse et Bordeaux, là où le Lot se jette dans la Garonne, dans un petit village qui s’appelle Nicole et où ils ont aussi rasé la gare de mon grand-père! Je suis un homme du sud-ouest et ça me manque terriblement.

Il faut venir vous installer à Toulouse!

J’en avais parlé à Douste-Blazy… Oui, je cherche une ancienne usine en brique, un atelier qui puisse me permettre de faire de la sculpture et de la peinture.

Sérieux?

Oui, j’adore Toulouse… Un des grands regrets de ma vie c’est de n’avoir pas très bien connu Claude Nougaro. J’en ai souffert, mais j’ai découvert qu’il est très difficile de devenir l’ami des gens totalement faits pour ce qu’ils font, ils sont toujours concentrés sur leur ego. Alors je suis passé à côté. Mais dans les derniers mois de sa vie, Nougaro m’a beaucoup reçu, plus que jamais et même cinq jours avant sa disparition. Je l’aimais beaucoup. Un immense talent qui malgré son immense succès n’a jamais eu la place qu’on a accordée à Gainsbourg qui ne m’a jamais fait pleurer alors que Brassens et Nougaro me font pleurer encore. Et avant de quitter cette planète, il faudrait bien, un jour, que je vienne chanter au Capitole, là où mon frère venait écouter le père Nougaro.

L’autre jour, vous étiez dans Paris avec Bob Dylan. Vous avez un projet commun, un nouvel album d’adaptations?

Non, je l’ai déjà fait en 96, trente ans après le premier (Aufray trans Dylan). Mais là, c’était juste une rencontre amicale, une balade tous les deux sur les bords de la Seine. Avec juste quelques confidences entre nous, quelques échanges sur ce que disent de nous les gens qui croient bien nous connaître. Et on a rigolé. Mais c’est un génie, Dylan!

Hugues Aufray, dimanche 20 novembre à 15h à la Halle aux Grains (et non samedi 19, comme c’était initialement prévu). 43,50 €, 38,50 €. Loc.: Fnac, Virgin, Leclerc, Auchan, Box office, SLT. Tél. 05.61.54.52.31.


Portrait chinois

Hugues Aufray, si vous étiez:

Un arbre?

L’olivier me fascine, oui.

Un animal?

Ah, je ne sais pas… Le cheval, oui ça semble évident, mais le col-vert, le petit canard, il vole quand même!…

Un pays?

La Gascogne! Aufray, c’est le nom de mon père, mais celui de ma mère c’est de Caubios d’Andiran et c’est une des plus vieilles familles basco-béarnaises, c’est mon pays!

Une couleur?

Le rouge.

Une femme?

Isabelle Adjani.

Un livre?

Le livre de la jungle.

Une star?

Gary Cooper!

Une chanson?

«Le petit joueur de fluteau» de Georges Brassens.

Une matière?

L’or blanc.

Un film?

Blues Brother.

Une ville?

Si je vous dis Toulouse, vous allez dire que j’exagère, mais c’est vrai que!… Alors une ville? Difficile!… Bon, Paris.

Une émission de télé?

Thalassa… Non, Ushuaïa.

Une voiture?

Une Jeep! Celle du débarquement.

Un chiffre?

8… Je suis né le 18.08.28!

Un plat cuisiné?

Le cassoulet!… mais précisez: avec des haricots tarbais!

Un monument?

Une pyramide d’Egypte.

  

Source : La Dépêche