Je vous pose un (Luce) lapin

Charlie Hebdo

N° 1237

LA RÉDACTION · 

H i, hi, hi ! Je rigole… Je rigole d’avance parce que vous allez pas être contents. J’ai décidé, d’un commun accord avec moi, dans le cadre de la promo pour mon album à venir, de faire un minimum d’interviews presse, un strict minimum d’interviews radio et DEUX émissions de télé. La première, ce sera Drucker (« Vivement dimanche »), où je peux inviter qui je veux : des écrivains que j’aime, des chanteurs qu’on ne voit jamais à la télé, un acteur qu’on voit souvent mais qui a bien du talent mais qui s’appelle Vincent et une actrice qu’on a vue dans une belle série mais qui fait quasiment jamais d’émissions de variétoche, pis une invitée prestigieuse qui n’a que trop rarement droit à la parole pour expliquer l’assoce qu’elle dirige (Un coeur pour la paix). La seconde, et c’est là que, j’imagine, vous allez vous insurger (peut-être pas d’ailleurs), ce sera une émission que j’aime bien et qui parle de la cause animale. Pas une émission pour mémère à chien-chien… Vous avez deviné, j’espère, il s’agit de « 30 millions d’amis » !

Il s’agira, en compagnie de mon chien Sunny et de mon chat Mallow, de raconter les animaux que j’aime, ceux que j’adore et ceux qui me laissent de marbre ou de frayeur. Vu que j’aime ou idolâtre presque tous les animaux de l’arche de Noé (ou que Dieu créa lors de la création de l’Univers, c’est selon), ça devrait pas être trop sorcier…

Je vais bien sûr commencer par les cétacés, baleines, narvals, orques, cachalots et autres dauphins ou marsouins que les Japonais déciment en toute impunité pour leurs vertus prétendument aphrodisiaques (moi, perso, ils me font bander aussi, mais pas à manger, juste à les regarder vivre – ou survivre), puis des poissons que je taquine mais remets systématiquement à l’eau (vivants) lorsqu’il m’arrive exceptionnellement d’en ferrer un. Je parlerai ensuite de l’ours, le grizzli, l’ours des Pyrénées ou l’ours en peluche, le premier abattu pour rien, le second chouchouté, câliné par les enfants de le monde entier. Vous parlerai des oiseaux, des rapaces, des moineaux, des pigeons, colombes ou tourterelles, des flamants roses ou du gypaète barbu, des rouges-gorges ou des perdreaux et des oies sauvages qui s’en allaient vers le Midi, la Méditerranée… J’aime aussi beaucoup les félins : les chats, les tigres, les panthères, les guépards et léopards, les lynx, les pumas et les hippopotames, mais là je suis moins sûr. J’aime les canidés, les loups, les chiens (meilleur ami de l’homme et de sa fiancée) et les hiboux, et là je suis sûr que je me fourvoie. J’aime pas trop les chevaux (plus belle conquête de l’homme et de sa maîtresse, dite cavalièrement « cavalière »), mais pas ceux qui s’en occupent, ils ont tous un petit grain, par exemple Bartabas. Je vais conclure par les vaches, surtout les salers rousses à grandes cornes (comme une fille légère que je connus jadis), mais, plus que tout, les taureaux, que j’aime voir paître tranquillos en Andalousie ou en Camargue plutôt que torturés, apeurés, puis tués et assassinés et achevés par de ridicules danseuses en ballerines et boléro de pacotille devant de vulgaires et emperlousées bobotes parisiennes ou, pire, niçoises, je sais, je l’ai déjà dit dans une chanson qui s’appelait Olé !

Ceux (les animaux) que j’aime bien mais que j’ai jamais vus sauf au Muséum national d’histoire naturelle de Paris – grande galerie de paléontologie – et encore, en squelettes, me fascinent un peu mais ils ont disparu suite à je ne sais plus quoi (genre une énorme météorite ou un essai nucléaire des Chinois) et pis ceux que j’aime pas trop : les insectes ! surtout les acariens qui dorment avec moi alors que je les ai même pas invités, les araignées et les scorpions et les blattes, dont on se demande s’ils ont réellement une âme. Dans le doute, et bien qu’ils squattent un peu ma maison de L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse), je m’abstiens de les trucider, me contentant de les pousser dehors d’un coup de balai parce que j’aime pas trop la mort, surtout la mienne, mais quand même, ils ont plein de poils ou sont venimeux comme un candidat FN et vous dévoreraient volontiers mais sont un peu trouillards alors ils osent pas. En vrac, j’aime aussi beaucoup les abeilles, les serpents et les tortues et les papillons mais pas de nuit, et les éléphants et les rhinocéros qu’on massacre pour leurs défenses ou leurs cornes soi-disant aphrodisiaques, les Japonais ayant visiblement des problèmes d’érection…

Mais le pire de tous s’appelle communément Homo erectus (surtout le mâle), car il a beau avoir le télé-encéphale hyperdéveloppé et le pouce préhenseur, il a aussi plein de poils et est trop souvent venimeux.

Elle va être bien la promo de mon nouvel album, non ? Ah bon…

  

Source : Charlie Hebdo (ici et ici)