Laisse béton (Place de ma mob) (Paroles)

Deuxième album studio de Renaud :

Laisse béton, aussi appelé parfois Place de ma mob, est le second album de Renaud, sorti le 7 octobre 1977, sous le label Polydor. En réalité, l’album n’a pas de titre, mais l’inscription « Place de ma mob » s’inscrit sur le décor de la couverture et Laisse béton est le titre de la première chanson.

Pour vous le procurer, c’est par ici !

1. Laisse béton
    (Renaud Séchan)

J’étais tranquille, j’étais peinard
accoudé au flipper,
le type est entré dans le bar,
a commandé un jambon-beurre,
puis il s’est approché de moi,
pi y m’a regardé comme ça :
T’as des bottes, mon pote, elles me bottent !
j’parie qu’c’est des santiags,
viens faire un tour dans l’terrain vague,
j’vais t’apprendre un jeu rigolo
à grands coups de chaîne de vélo
j’te fais tes bottes à la baston !
moi j’y ai dit :
Laisse béton !

Y m’a filé un beigne, j’y ai filé une torgnole,
m’a filé une châtaigne, j’lui ai filé mes grolles.

j’étais tranquille, j’étais peinard.
accoudé au comptoir,

le type est entré dans le bar,
a commandé un café noir,
puis il m’a tapé sur l’épaule
et m’a regardé d’un air drôle :
T’as un blouson, mecton l’est pas bidon !
moi j’me les gèle sur mon scooter,
avec ça j’s’rai un vrai rocker,
viens faire un tour dans la ruelle.
j’te montrerai mon Opinel,
et j’te chourav’rai ton blouson ! Moi j’y ai dit :
Laisse béton !

Y m’a filé une beigne, j’y ai filé un marron,
m’a filé une châtaigne, j’y ai filé mon blouson.

J’étais tranquille, j’étais peinard,
je réparais ma mobylette,
le type a surgi sur l’boul’vard
sur sa grosse moto super-chouette,
s’est arrêté l’long du trottoir
et m’a regardé d’un air bête :
T’as l’même blue-jean que James Dean,
t’arrête ta frime !
j’parie qu’c’est un vrai Lévi Strauss,
il est carrément pas craignoss,
viens faire un tour derrière l’église,
histoire que je te dévalise
à grands coups de ceinturon ! Moi j’y ai dit :
Laisse béton !

Y m’a filé une beigne, j’ai filé une mandale,
m’a filé une châtaigne, j’y ai filé mon futal.

La morale de c’te pauvre histoire,
c’est qu’quand t’es tranquille et peinard
faut pas trop traîner dans les bars,
à moins d’être fringué en costard.

Quand à la fin d’une chanson,
tu t’retrouves à poil sans tes bottes.
faut avoir d’l’imagination
pour trouver une chute rigolote.

2. Le blues de la Porte d’Orléans
    (Renaud Séchan)

Puisque les Basques et les Bretons,
les Alsaciens, les Occitans,
les Corses, les Chtimis, les Wallons
y veulent tous être indépendants,
puisqu’y veulent tous l’autonomie,
qu’à priori y z’ont pas tort
ben c’est décidé, moi aussi
j’prends ma guitare et j’crie bien fort
que je suis le séparatiste
du quatorzième arrondiss’ment,
Oui que je suis l’autonomiste
de la Porte d’Orléans.

Le quatorzième arrondissement
C’est mon quartier d’puis 25 berges
C’est dans ses rues que j’passe mon temps
Dans ses bistrots que je gamberge
Quand je m’balade au long d’ses rues
J’peux pas oublier qu’autrefois
Vercingétorix s’est battu

Tout près du métro Alésia.
Moi je suis le séparatiste
du quatorzième arrondiss’ment,
Oui moi je suis l’autonomiste
de la Porte d’Orléans.

Le quatorzième arrondissement
Possède sa langue et sa culture
Et l’autoroute Porte d’Orléans
C’est le début d’la côte d’usure
Dans le treizième j’ai des copains
Qu’ont un peu les mêmes idées qu’moi
On va faire un programme commun
Aux élections on s’présentera
Car moi je suis l’séparatiste
du quatorzième arrondiss’ment,
Oui moi je suis l’autonomiste
De la Porte d’Orléans

Bien sûr la Seine nous arrose pas
Mais ça peut toujours s’arranger,
À coups d’pétitions pourquoi pas ?
On pourrait p’t’être la détourner.
Tout ça pour dire que l’quatorzième
C’est un quartier qu’est pas banal,
À part les flics qu’y sont les mêmes
Que dans l’reste de la capitale.
Moi je suis le séparatiste
du quatorzième arrondiss’ment,
Oui moi je suis l’autonomiste
De la Porte d’Orléans.

3. La chanson du loubard
    (Renaud Séchan, paroles de Muriel Huster)

Le jour se lève sur ma banlieue
J’ai froid c’est pourtant pas l’hiver
Qu’est’ce que j’pourrais foutre nom de Dieu
J’ai pas un rond et j’ai pas l’air
sérieux, sérieux

J’suis un loubard parmi tant d’autres
Je crèche pas loin de la Défense
J’ai l’air crado, c’est pas ma faute
Mon HLM c’est pas Byzance
Mon pote, mon pote

À quatorze ans, mon paternel
M’a fait embaucher à l’usine
Deux jours plus tard j’ai fait la belle
Paraît que j’suis un fils indigne, bordel

Un soir dans une rue déserte
J’ai fauché une Honda 500
À un fils de bourgeois honnête

Avec elle je fonce à 200
Ouais c’est chouette, c’est chouette

Mon copain Pierrot s’est planté
Sur l’autoroute un jour de pluie
Parfois je l’entends rigoler
C’est sûr qu’il est au Paradis
C’t’enflé, c’t’enflé

Et moi j’continue mon cinoche
Au pied de ces buildings miteux
J’voudrais crever avant d’être moche
J’voudrais finir comme toi mon vieux Gavroche

J’suis un loubard périphérique
J’en ai plein les bottes de ce bled
La France est une banlieue merdique
Comme dit mon copain Mohamed
Aux flics, aux flics

Le jour se lève sur ma banlieue
J’ai froid c’est pourtant pas l’hiver
C’est drôle le bitume est tout bleu
Y’a ma bécane qui crame par terre
Bon Dieu, bon Dieu
Oh, bon Dieu
Oh mon Dieu, bon Dieu …

4. Je suis une bande de jeunes
    (Renaud Séchan, musique de François Bernheim)

Mes copains sont tous en cabane,
ou à l’armée ou à l’usine.
Y se sont rangés des bécanes,
y’a plus d’jeunesse tiens ça m’déprime.
Alors pour mettre un peu d’ambiance
dans mon quartier de vieux débris,
j’ai groupé toutes mes connaissances
intellectuelles, et c’est depuis

que j’suis une bande de jeunes
à moi tout seul.
Je suis une bande de jeunes,
j’me fends la gueule.

Je suis le chef et le sous-chef,
je suis Fernand le rigolo,
je suis le p’tit gros à lunettes,
je suis Robert le grand costaud.
Y’a plus d’problème de hiérarchie
car c’est toujours moi qui commande,

c’est toujours moi qui obéis,
faut d’la discipline dans une bande.

Je suis une bande jeunes
à moi tout seul.
Je suis une bande de jeunes,
j’me fends la gueule.

Quand j’débarque au bistrot du coin
et pis qu’un mec veut m’agresser,
ben moi aussitôt j’interviens,
c’est beau la solidarité.
Quand je croise la bande à Pierrot,
Y sont beaucoup plus nombreux,
ça bastonne comme à Chicago,
c’est vrai qu’dans sa bande y sont deux.

Je suis une bande jeunes
à moi tout seul.
Je suis une bande de jeunes,
j’me fends la gueule.

Quand dans ma bande y’a du rififi,
Je m’téléphone, je m’fais une bouffe,
J’fais un colloque j’me réunis.
C’est moi qui parle et c’est moi qu’écoute.
Parfois j’m’engueule pour une soute
Qu’est amoureuse de toute ma bande,
Alors la sexualité de groupe,
Y’a rien de tel pour qu’on s’entende.

Je suis une bande jeunes
à moi tout seul.
Je suis une bande de jeunes,
j’me fends la gueule.

Quand j’me balade en mobylette,
On dirait l’équipée sauvage,
Quinze décibels c’est la tempête
Dans tout le voisinage.
Et pis si un jour en banlieue
Toute ma bande est décimée
Par toute une bande de vieux,
Je me battrai jusqu’au dernier, car

Je suis une bande jeunes
à moi tout seul.
Je suis une bande de jeunes,
j’me fends la gueule.

I’m a poor lonesome young band,
I feel alone
I’m a poor loneome young band,
I break my gueule.

5. Adieu minette
    (Renaud Séchan)

Sous tes cheveux beaucoup trop blonds
Décolorés ça va de soi
T’avais une cervelle de pigeon
Mais j’aimais ça mais j’aimais ça

Au fond de tes grand yeux si bleus
Trop maquillés ça va de soi
T’avais que’que chose de prétentieux
Que j’aimais pas que j’aimais pas

J’avais la tignasse en bataille
Et les yeux délavés
Je t’ai culbutée dans la paille
T’as pris ton pied

Adieu fillette
Nous n’étions pas du même camp
Adieu minette
Bonjour à tes parents

Tu m’as invité à Deauville
Dans ta résidence secondaire
Je m’suis fait chier comme un débile
Dans cette galère dans cette galère

Adieu fillette
Nous n’étions pas du même camp
Adieu minette
Bonjour à tes parents

Tu m’as invité à Deauville
Dans ta résidence secondaire
Je m’suis fait chier comme un débile
Dans cette galère dans cette galère

Tu m’as présenté tes copains
Presqu’aussi cons qu’des militaires
C’était des vrais Républicains
Buveurs de bière buveurs de bière

Le grand type qui s’croyait malin
En m’traitant d’anarchiste
Je r’grette pas d’y avoir mis un pain
Avant qu’on s’quitte

Adieu fillette
Nous n’étions pas du même camp
Adieu minette
Bonjour à tes parents

Mais quand t’es rentrée à Paname
Super fière de ton bronzage
T’as pas voulu poser tes rames
Sur le rivage c’est une image

Tu m’as téléphoné cent fois
Pour que j’passe te voir à Neuilly
Dans ton pavillon près du bois
Et j’ai dit oui et j’ai dit oui

J’suis v’nu un soir à ta surboum
Avec 23 d’mes potes
On a piétiné tes loukoums
Avec nos bottes

Faut pas en vouloir aux mariolles
Y z’ont pas eu d’éducation
À la Courneuve y’a pas d’école
Y’a qu’des prisons et du béton

D’ailleurs y z’ont pas tout cassé
Yz’ont chouravé qu’l’argentrie
Ton pote qu’y f’sait du karaté
Qu’est-ce qu’on y’a mis qu’est-ce qu’on y’a mis

Ton père j’l’ai traité d’enfoiré
Excuse-moi auprès de lui
Si j’avais su que c’était vrai
J’y aurai redit

Maintenant j’ai plus envie d’causer
Tu devrais déjà avoir compris
Qu’on est pas né du même côté
D’la bourgeoisie d’la bougeoisie

Arrête une minute de chialer
Tu vois quand même que j’t’oublie pas
Je t’téléphone en PCV
De Nouméa de Nouméa

Ça fait trois s’maines que j’suis bidasse
L’armée c’est une grande famille
La tienne était moins dégueulasse
Follement la quille

6. Les charognards
    (Renaud Séchan)
(Les Charognards raconte un braquage sanglant dont Renaud a été le témoin sur la rue Pierre Charon en décembre 1975. Pour en savoir davantage, c’est par ici !)

Il y’a beaucoup de monde dans la rue Pierre Charon
il est 10 heures du mat’ le braquage a foiré
J’ai une balle dans le ventre une autre dans le poumon
J’ai vécu à Sarcelles j’crève aux Champs-Élysées

Je vois la France entière du fond de mes ténèbres
Les charognards sont là, la mort ne vient pas seule
J’ai la connerie humaine comme oraison funèbre
Le regard des curieux comme unique linceul

C’est bien fait pour ta gueule
Tu n’es qu’un p’tit salaud
On n’portera pas le deuil
C’est bien fait pour ta peau

Le boulanger du coin a quitté ses fourneaux
Pour s’en venir cracher sur mon corps déjà froid
Il dit « J’suis pas raciste mais quand même les bicots
Chaque fois qu’y a un sale coup ben y faut qu’y z’en soient

« Moi Monsieur j’vous signale que j’ai fait l’Indochine »
Dit un ancien para à quelques arrivistes
« Ces mecs c’est d’la racaille c’est pire que les Viêt-Minh
Faut les descendre d’abord et discuter ensuite »

C’est bien fait pour ta gueule
Tu n’es qu’un p’tit salaud
On n’portera pas le deuil
C’est bien fait pour ta peau

Les zonards qui sont là vont s’faire lyncher sûrement
Si y continuent à dire que les flics assassinent
Qu’on est un être humain même si on est truand
Et que ma mise à mort n’a rien de légitime

« Et s’ils prenaient ta mère comme otage ou ton frère ? »
Dit un père béret basque à un jeune blouson d’cuir ;
« Et si c’était ton fils qu’était couché par terre
Le nez dans sa misère » répond l’jeune pour finir

C’est bien fait pour ta gueule
Tu n’es qu’un p’tit salaud
On n’portera pas le deuil
C’est bien fait pour ta peau

Et Monsieur blanc-cassis continue son délire
Convaincu que déjà mon âme est chez le diable
Que ma mort fut trop douce que je méritais pire
J’espère bien qu’en enfer je r’trouverai ces minables

Je n’suis pas un héros, j’ai eu c’que j’méritais
Je ne suis pas à plaindre j’ai presque de la chance
Quand je pense à mon pote qui lui n’est que blessé
Y va finir ses jours à l’ombre d’une potence

Elle n’a pas 17 ans cette fille qui pleure
En pensant qu’à ses pieds il y a un homme mort
Qu’il soit flic ou truand elle s’en fout sa pudeur
Comme ses quelques larmes me réchauffent le corps

Il y a beaucoup de monde dans la rue Pierre Charon
Il est 2 heures du mat’ mon sang coule au ruisseau
C’est le sang d’un voyou qui rêvait de millions
J’ai des millions d’étoiles au fond de mon caveau
J’ai des millions d’étoiles au fond de mon caveau

7.  Jojo le démago
    (Renaud Séchan)

Attachez vos ceintures
éteignez vos mégots
car voici l’aventure
De Jojo le démago

Voici l’histoire pas très banale
d’un gars qu’était fils de prolos
qui travaillait la nuit aux Halles
qui traînait jamais les bistrots
L’avait d’l’allure
l’avait d’la classe
l’avait pas l’air d’un gigolo
il se distinguait de la masse
l’avait l’étoffe d’un hidalgo

C’est Jojo l’démago
L’président des gogos
qui fascine les pequ’nots
quand il danse le tango

Jojo avait de l’ambition
Y voulait oublier son rang
Y rêvait d’grimper les éch’lons
Et d’finir un jour président

Y d’vint l’idole de la jeunesse
Car il savait se faire aimer
Surtout des gars d’Garges-Les-Gonesses
Qu’étaient là que pour faire rimer

C’est Jojo l’démago
L’président des gogos
On peut voir sa photo
Sur les murs du métro – cadéro !

Un jour y misa son larfeuille
Sur un tocard à cent contre un
Dans la cinquième course à Auteuil
Le cheval gagna haut la main
Jojo toucha le gros paxonne
Il s’arrêta de travailler
Il se fit des tas d’relationnes
Du côté d’la bonne société

C’est Jojo l’démago
Qu’a trahi les prolos
Y traîne les casinos
De Nice à Monaco – caïne !

‘L’harangua si bien les rombiers
D’son quartier qu’un beau jour enfin
Les p’tits commerçants les plombiers
L’élirent député du coin
Mais Jojo qui savait causer
Fit tant et si bien son turbin
De représentant des larbins
Qu’on l’élisa à l’Elysée

C’est Jojo l’démago
L’président des gogos
Qui vous paye l’apéro
Sur l’argent des impôts – pulo !

8. Buffalo débile
    (Renaud Séchan)
(Dans cette chanson, Renaud rend hommage au « casse du siècle » réalisé par Albert Spaggiari à la Société Générale de Nice l’année précédente. Le braqueur avait en effet creusé un tunnel sous la banque, dévalisé la cave, et inscrit au mur : « Ni haine, Ni armes, Ni violence »… Six mot que Renaud reprend à la fin de sa chanson humoristique. Source : Renaud : Chanteur énervé et énervant)

En passant par les égouts,juste devant ma maison,
J’ai creusé un tunnel de dix-huit mètres de long.
J’ai atterri dans la cave d’une laiterie Parisienne,
J’ai pris trois cents Carambars, un kilo de madeleines.
J’ai eu des crampes d’estomac au moins pendant trois semaines.

J’suis le roi des casseurs, j’suis le roi des braqueurs,
Les journaux parlent pas d’moi et c’est ça qui m’écœure.

J’ai volé une bagnole qu’était même pas à moi
J’voulais aller sur la Côte, j’me suis r’trouvé sur le toit,
Les quatre roues en l’air mon père m’a engueulé
Comme si c’était sa bagnole que j’lui avais bousillée ;
D’ailleurs c’était la sienne, j’pouvais pas l’deviner.

J’suis le roi des cass’cou, j’suis le roi des fitous,
Les journaux parlent pas d’moi, mais alors pas du tout.

Avec un de mes copains, on a voulu détourner
Un Boeing 707, on n’en a pas trouvé,

A la porte d’Orléans, ils veulent pas s’arrêter.
On est mal desservi dans c’quartier, nom de nom !
Alors j’ai détourné la conversation.

J’suis le roi des pirates de l’air conditionné,
Les journaux parlent pas d’moi, mais ça va pas tarder.

Un peu plus tard j’ai fait le hold-up du siècle,
A grands coups de burin j’ai cassé un parc-mètre.
L’aubergine intrépide qu’a voulu s’y opposer,
J’lui ai dit des mots obscènes, elle s’est mise à pleurer.
Y’avait qu’trois francs cinquante dans la caisse fracturée.

J’suis le roi des casseurs, j’suis le roi des braqueurs,
Vous pouvez constater j’l’ai d’jà dit tout à l’heure.

Si j’continue à faire des chansons dans c’genr’ là,
C’est pas demain la veille qu’les journaux parl’ront d’moi.

9. La Boum
    (Renaud Séchan)

Les copains m’avaient dit :
On compte sur toi dimanche
Y’aura p’t’être la Sylvie
Qui viendra sans son mec
Elle est con comme un manche
Mais t’as la cote avec
T’as pas à t’faire de bile
Pour toi c’est dans la poche
T’es pas encore débile
Et elle est pas trop moche
Elle est pas v’nue la belle
J’ai tenu les chandelles

J’irai plus dans vos boums
Elles sont tristes à pleurer
Comme un sourire de clown
Comme la pluie sur l’été

Toute façon t’en fais pas
M’avaient dit les copains

Les nénettes y’en aura
Dix fois plus que des mecs
Le quart d’heure américain
Ça va tripoter sec
Des filles y’en avait qu’douze
Pour quatre-vingt poilus
On fait mieux comme partouze
Mais non j’suis pas aigri
Y’a qu’avec les p’tits « Lu »
Qu’ça a été l’orgie

J’irai plus dans vos boums
Elles sont tristes à pleurer
Comme un sourire de clown
Comme la pluie sur l’été

Lorsque j’suis arrivé
Sur ma vieille mobylette
Y’en avait qu’écoutaient
L’dernier David Bowie
Ils flippaient comme des bêtes
Autour d’une chaîne pourrie
Ils fumaient des P4
En buvant du Coca
Un pauvr’ type sur sa gratte
Jouait « Jeux interdits »
Y’avait même une nana
Qui trouvait ça joli

J’irai plus dans vos boums
Elles sont tristes à pleurer
Comme un sourire de clown
Comme la pluie sur l’été

Y’avait deux, trois loubards
Qu’assumaient leurs instincts
En chouravant dans l’noir
Des disques et des port’feuilles
J’voyais tout, j’disais rien
C’étaient mes potes d’Argenteuil
Plus tard dans la soirée
J’ai fait marrer tout l’monde
Faut dire qu’j’ai raconté
Trois cent mille histoires belges
J’en connais des immondes
Mais j’les gard’ pour les Suisses

J’irai plus dans vos boums
Elles sont tristes à pleurer
Comme un sourire de clown
Comme la pluie sur l’été

Lorsque j’me suis barré
J’ai croisé les roussins
Uniforme bleu foncé
Et képi sur le crâne
Tout ça à cause d’un voisin
Qu’aimait pas Bob Dylan
M’ont foutu un PV
Pas d’lumière sur ma meule
On cru bon d’ajouter
Qu’ils aimaient ta jeunesse
Puis j’suis resté tout seul
Même pas en état d’ivresse

J’irai plus dans vos boums
Elles sont tristes à pleurer
Comme un sourire de clown
Comme la pluie sur l’été

10.  Germaine
       (Renaud Séchan)

Elle habitait, Germaine
Une chambre de bonne,
Quelque part dans l’cinquième,
A côté d’la Sorbonne,
Les W-C sur l’palier,
Une fenêtre sur la cour,
En haut d’un escalier
Qu’avait jamais vu l’jour.
Et sur les murs sans joie
De ce pauvre boui-boui,
Y’avait Che Guevara
Les Pink Floyd et Johnny.
Sur l’vieil électrophone
Trop souvent détraqué,
Elle écoutait les Stones
Et Maxime le Forestier.

Germaine Germaine, une java ou un tango,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime,
Qu’importe le tempo,

Germaine, Germaine, un rock’n’roll ou un slow,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime
Et que j’t’ai dans la peau.

Ça sentait bon chez elle
L’herbe et le patchouli
Le parfum des poubelles
Au petit matin gris.
On buvait de la bière
Et du thé au jasmin
Assis en rond par terre
Sur un tapis indien.
Les voisins du dessous
Étaient bien sympathiques,
Quand on f’sait trop les fous
Ils se plaignaient qu’aux flics.
Enfin bref chez Germaine
C’était vraiment Byzance,
Tous les jours de la s’maine
On était en vacances

Germaine Germaine, une java ou un tango,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime,
Qu’importe le tempo,
Germaine, Germaine, un rock’n’roll ou un slow,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime
Et que j’t’ai dans la peau.

Mais quand elle est partie
Un jour pour Katmandou,
Moi j’vous jure les amis,
Ça m’a fichu un coup
Sur la place Saint-Michel,
Où elle traînait parfois,
On parle encore d’elle,
Des sanglots dans la voix.
Moi j’ai repris sa piaule
Mais c’est plus comme avant
C’est même plus vraiment drôle,
Elle me manque souvent.
Mais son électrophone,
Elle me l’a laissée,
Comme ses disques des Stones
Et d’Maxime Le fox-terrier

Germaine Germaine, une java ou un tango,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime,
Et qu’j’aime la Kanterbräu 
Germaine, Germaine, un rock’n’roll ou un slow,
C’est du pareil au même, pour te dire que je t’aime
Et que j’t’ai dans la peau

11.  Mélusine
       (Renaud Séchan)

(Mélusine, chanson d’amour)
J’ai connu Mélusine
Au mois d’Mai à l’usine
A côté de Liévin
Elle était bien gamine ;
Mais comme disait Bourvil
Y’a beaucoup d’gens gamins.
(Jean Gabin, c’est rigolo)

Quand j’ai connu Sabine
Elle était dans son bain
J’aimais bien sa bobine
On s’est aimé un brin ;
Mais comme disait Daudet
Y’a beaucoup d’Jean Moulin.
(Rouge)

Quand j’ai connu Catherine
J’composais des quatrains
Avec une catin
Là-bas en Argentine ;
Mais comme disait Krivine,
Y’a beaucoup d’Jean Nohain.
(C’est hilarant, de la Baltique)

Quand j’ai connu Martine
C’était un beau matin
J’ai beurré ses tartines
J’ai roulé des patins ;
Comme disait Lamartine
Y’a beaucoup d’Jean Bouquin
(Là je sais pas quoi dire)

Quand j’ai connu Yasmine
J’y ai offert du jasmin
Elle avait mauvaise mine
J’ai demandé sa main
Mais comme disait Lénine ;
Y’a beaucoup d’Jean Rumain.
(International sera le genre humain… ouais, le dernier)

Quand j’ai connu Amine
Je faisais du dada
J’mangeais des nougatines
Là-bas en Ouganda ;
Mais comme disait Merlin
Ben heu enchanté…
(Thé au jasmin…)
(Allo c’est toi maman ?)

12. La bande à Lucien
      (Renaud Séchan)

Ça fait quand même vach’ment plaisir
de t’retrouver, mon pote Lucien,
j’parie que t’es encore sans un
et qu’t’as toujours ton blouson d’cuir.
T’as pas changé d’puis 68,
à c’t’époque on s’fendait la gueule,
aujourd’hui t’as l’air un peu seul,
allez viens, on va s’prendre une cuite.

Hé dis-moi Lucien, où c’est qu’elle est ta bande ?
maint’nant qu’est’c’que tu glandes sans tes copains ?

Dis, comment qui s’app’lait le petit,
ç’ui qui volait des mobylettes,
ç’ui qu’a plongé en 67
et qu’on a pas revu depuis ?
Ça doit pas être le super-pied,
la vie à Fleury-Mérogis,
mais elle supporte pas, la Justice,
qu’on crache à la gueule du greffier.

Hé dis-moi Lucien, où c’est qu’elle est ta bande ?
maint’nant qu’est’c’que tu glandes sans tes copains ?
Et Pierrot, le fou d’la bécane,
qu’a eu les deux jambes écrasées,
il aurait mieux fait d’y passer,
c’est vraiment trop con les platanes.
Il bosse toujours à l’atelier
assis sur un fauteuil roulant ?
Tu m’dis qu’il chiale de temps en temps,
tu vois j’m’en s’rais un peu douté.

J’pense pas qu’t’ai oublié Riton
qui s’est fait descendre au bistrot
d’une balle dans l’ventre ah ! les salauds !
Parc’qu’il avait cogné l’patron.
T’as plus d’nouvelles de Marilyn,
Celle qu’est partie pour Ibiza ?
‘doit être en train d’crever là-bas
Avec sa p’tite sister-Morphine.

Hé dis-moi Lucien, où c’est qu’elle est ta bande ?
maint’nant qu’est’c’que tu glandes sans tes copains ?

Eh toi mon vieux, mon pote Lucien,
c’est vrai q’t’habites chez ta belle-doche,
Que t’es marié, que t’as des mioches,
qu’tu travailles pour qu’ils aient du pain ?
Tu sais j’ai une idée super,
on va former une nouvelle bande,
si tu veux c’est toi qui commandes,
siou-plaît patron, encore une bière…

Hé dis-moi Lucien, où c’est qu’elle est ta bande ?
maint’nant qu’est’c’que tu glandes sans tes copains ?

Hé dis-moi Lucien, où c’est qu’elle est ta bande ?
maint’nant qu’est’c’que tu glandes sans tes copains ?