Le 28 août 1985, le jour où Renaud a basculé dans la dépression, l’alcool et les emmerdes: « Une partie de lui a disparu ce jour-là »

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| Publié le 01-06-2021 à 20h15 | Mis à jour le 02-06-2021 à 15h43

Il faut remonter plus de 35 ans en arrière pour comprendre comment Renaud a plongé dans la dépression et l’alcool.

Le 28 août 1985, Renaud est invité à se produire en URSS à l’occasion du Festival mondial de la jeunesse et des étudiants. Mais lorsqu’il entame « Le Déserteur », chanson pacifiste, devant 10 000 personnes dans le parc Gorki, un tiers du public se lève et quitte les lieux. Un traumatisme pour le chanteur. C’est le début de sa descente aux enfers. « C’était la fin de ses illusions. L’URSS n’était plus la patrie des travailleurs, du prolétariat, c’était une dictature où la liberté d’expression n’existait pas et où il y avait une répression féroce, explique David Séchan, son frère jumeau. D’un seul coup, tout s’est effondré. Ça a créé chez lui une rupture avec ses idéaux communistes. Il a fait une dépression assez carabinée. Il soupçonnait le KGB de vouloir l’éliminer pour avoir découvert l’envers du décor. Un choc terrible. »

C’est le début de ses emmerdes ?

« Oui. Et de l’alcool. Avant, Renaud ne buvait pas. Il était sage, que ce soit en tournée ou avec des amis. S’il a bu, c’est pour calmer ses angoisses. »

Renaud s’est-il complètement perdu ce jour-là ?

« C’est certain, une partie de lui a disparu. Et c’était la fin de son couple. C’était déchirant parce que l’amour était toujours là. Et il l’est encore. Mais la vie à deux devenait impossible à cause de son addiction à l’alcool et de sa dépression. Il était muré dans un silence profond. C’est ce qui a précipité sa séparation avec Dominique, sa muse. J’ai pensé qu’il n’en sortirait jamais. Puis il y a eu ce retour à la vie avec Romane qui l’a sorti de sa léthargie et lui a permis de sortir un superbe album, Boucan d’enfer, enregistré à Bruxelles, sa plus grosse vente. C’était un rebond phénoménal. Je me suis dit que mon frère était un monstre, un Phénix. Puis, il est retombé dans la dépression. Ensuite, il y a eu les attentats de Charlie Hebdo et cette prise de conscience qu’il fallait qu’il témoigne pour ses amis assassinés. »

C’est un miraculé ?

« Avec tout ce qu’il a consommé, oui, c’est un miraculé. Comme Johnny, il est une sorte de monstre qui parvient à revenir d’enfers cycliques. C’est exceptionnel même si je pense qu’il préférerait avoir une vie plus calme. »

Aujourd’hui, on l’annonce régulièrement à l’agonie. Comment va-t-il ?

« Ça fait des années qu’on m’annonce sa mort prochaine. Mais je le connais bien et il est très résistant, même s’il va d’addiction en addiction. Il ne boit plus mais il fume encore, malheureusement. C’est son nouveau combat. Il va mieux et il a des projets. Il a repris contact avec son producteur et son réalisateur. Les choses vont plutôt bien pour l’instant, mais avec Renaud, je ne peux plus rien prévoir. J’ai tellement pensé qu’il était perdu alors qu’il a rebondi plusieurs fois… Il est capable de tout. »

Comment a-t-il pris les critiques concernant sa voix et sa dernière chanson, celle sur le coronavirus ?

« Un de ses admirateurs a un jour dit ‘Renaud, tu chantes mal mais tu chantes juste’. C’est très pertinent comme réflexion. Sa chanson sur le coronavirus n’est pas sa meilleure, loin de là. Il y aurait beaucoup à dire sur le texte. Mais ça lui a permis de rejouer, de reprendre contact avec son métier, même si c’est un essai assez moyen. »

   

Source : DH Les Sports+