Dans sa tendre chanson Petite, Renaud mentionne quatre personnes décédées en 1986 (incluant son ami Michel Colucci, dit Coluche) :
Et puis ces déchirures, à jamais dans ta peau
Comme autant de blessures, et de coups de couteau
Cicatrices profondes, pour Malik et Abdel
Pour nos frangins qui tombent, pour William et Michel
Renaud confirma durant son spectacle à l’Olympia de Paris le 15 décembre 1996 que le « Michel » de la chanson était bel et bien son ami mort en 1986, Coluche :
Le , la mort brutale de Coluche affecte gravement Renaud. Il fut interviewé le jour même du décès par Jean-Pierre Ferland (sur SRC) alors qu’il était en tournée de promotion au Québec :
Malik Oussekine, jeune maghrébin, est né le est mort lors d’une manifestation étudiante le 6 décembre 1986 :
L’affaire Malik Oussekine est une affaire de violence policière française résultant de la mort de Malik Oussekine, dans la nuit du au à Paris, après plusieurs semaines de contestation étudiante contre le projet de réforme universitaire Devaquet. Selon un commentaire sur un blog,
Il a été sauvagement matraqué par un CRS sous un porche d’immeuble, Rue Monsieur-Le-Prince à Paris, lors d’une manifestation étudiante.
Dès le samedi matin 6 décembre, à suite du décès de Malik Oussekine, les étudiants sont reçus au ministère de l’Intérieur et organisent une marche silencieuse, tandis que le ministre délégué Alain Devaquet présente sa démission. À la suite de cette marche silencieuse, le journaliste Roland Bacri publia une adaptation de la chanson « Je suis une bande de jeunes » de Renaud dans le journal satirique Le Canard enchaîné :
Deux jours après la marche, le projet de loi Devaquet est retiré. Deux des trois policiers qui ont frappé mortellement Malik Oussekine sont ensuite jugés et condamnés, mais sans peine de prison ferme, et sanctionnés professionnellement.
Dans le film La Haine de Mathieu Kassovitz, Vincent Cassel fait allusion à Malik Oussekine lors de sa dispute avec Hubert dans les toilettes. Le générique de début fait également référence à cette affaire à travers le choix des images d’archives utilisées. Toutefois, le scénario s’inspire plutôt de l’affaire Makomé M’Bowolé.
Voici quelques reportages datant du 6 décembre 1986 sur les événements entourant la mort de Malik Oussekine lors de manifestations contre le projet de loi Devaquet :
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Abdel Benyahia
Dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, des policiers tuent Malik Oussekine à Paris lors de manifestations étudiantes contre le projet de loi Devaquet (voir ci-haut) et Abdelouahab (« Abdel ») Benyahia à la station Quatre Chemins (ligne 7 du métro de Paris, située à la limite des communes d’Aubervilliers et de Pantin, sous l’avenue Jean-Jaurès). Tous deux étaient français d’origine algérienne. Selon un commentaire sur un blog,
Le 5 décembre 1986 à Pantin, un inspecteur de police (Savrey) tue un jeune Algérien de 20 ans, Abdel BENVAHIA, dans un café. Il avait 1,84 g d’alcool dans le sang et n’était pas en service. Pendant 48 heures, c’est le blackout total dans tous les services (police et judiciaire). La famille n’est avertie que le 8 décembre de l’endroit où a été transporté le corps.
Savrey est inculpé « d’homicide involontaire » et laissé en liberté sous contrôle judiciaire. Six mois après le meurtre, le crime est requalifié « d’homicide volontaire » et Savrey est incarcéré. Le procès, renvoyé aux assises, a lieu les 23, 24 et 25 novembre 1988.
Quelques jours après leur mort, près d’un million de personnes ont manifesté en France derrière les portraits de Malik Oussekine et d’Abdel Benyahia aux cris de : « PLUS JAMAIS ÇA ! » et « ON S’EN SOUVIENDRA ! ».
Le court-métrage ci-bas rend hommage à Abdel, en rappelant d’abord les faits : aux Quatre Chemins à Pantin, devant le bar « Tout est bien », une bagarre éclate. Abdel, 19 ans, s’interpose. Un homme en civil crie « police » et tire à bout portant. Que s’est-il passé ensuite ? Du côté de la police et des hôpitaux, pendant 48 h, c’est le black-out…
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William Normand
Selon le HLM des Fans de Renaud :
Le 31 juillet 1986, à l’issue d’une opération de police dans un quartier de Fontenay-sous-Bois (situé à 3 km à l’est de Paris), le jeune motard William Normand, 20 ans, est abattu d’une balle dans le dos. Le tireur, Eric Laignel, gardien de la paix, inculpé pour « coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner » sera acquitté le 30 juin 1989 par la cour d’assises du Val-de-Marne.
Michel Colucci, dit Coluche, était un humoriste et comédien français, né le dans le 14e arrondissement de Paris. Il est mort le à Opio (Alpes-Maritimes).
Fils d’un immigré italien et d’une Française, Michel Colucci grandit à Montrouge. Il adopte le pseudonyme « Coluche » à l’âge de 26 ans, au tout début de sa carrière. Revendiquant sa grossièreté mais, selon lui, « sans jamais tomber dans la vulgarité », Coluche donne très tôt un style nouveau et sarcastique par sa liberté d’expression au music-hall, en brocardant notamment les tabous et valeurs morales et politiques de la société contemporaine. En 1975, il devient célèbre en parodiant un jeu télévisé : Le Schmilblick.
Tour à tour provocateur ou agitateur par ses prises de position sociales, il se présente à l’élection présidentielle de 1981 avant de se retirer, à la suite de pressions et de menaces. Jouissant d’une énorme popularité et très apprécié du public, il fonde en 1985 l’association Les Restos du cœur, relais d’aide aux plus pauvres, quelques mois avant de mourir dans un accident de moto :
Coluche a écrit et composé pour Renaud, le titre Soleil immonde, paru sur l’album Le Retour de Gérard Lambert sorti en 1981. Renaud cite également son ami artiste dans la chanson Mon bistrot préféré, dans l’album et la chanson Putain de camion ainsi que dans La vie est moche et c’est trop court.
Voici un documentaire de Jean-Louis Perez, datant de 2011, intitulé « Coluche : un clown ennemi d’État » :