On a vu Renaud en concert à Montpellier : il n’a pas retrouvé de la voix, mais du poil de la bête assurément

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JÉRÉMY BERNÈDE

« Photos interdites », clamait un message avant le début du concert. Renaud, en personne, a démenti : en famille, les photos, ça se fait !
JBE

Renaud était en concert ce samedi 24 février à l’opéra Berlioz, à Montpellier. En dépit d’un chant qui reste et demeure problématique, pour ne pas dire absent, le chanteur s’est montré en forme, sympathique et malicieux dans ses interventions, et soutenu qui plus est admirablement par ses musiciens… et ses fans, toujours aussi nombreux et joyeux.  

Ainsi donc le chant de Renaud serait encore un sujet ? Depuis l’an dernier qu’il est reparti en tournée, il n’est pas un de ses concerts qui ne soit accompagné par le canon des rageux, qui hurlant au scandale auditif, qui déplorant l’exploitation du monument en péril, qui moquant l’arnaque à bobos, qui tirant dans le tas, comme ça gratuitement par plaisir, faut bien qu’ils se défoulent un petit peu… N’empêche qu’il est sympa, Renaud : il n’a forcé aucun de ces choristes, aucune de ces trompettes de sa renommée, à venir le voir sur scène! Ses fans, eux, savent.

Ils sont au courant que son chant, déjà fragile à la base, a traversé sans faire gaffe à lui, l’autoroute de l’existence et qu’il s’est fait rouler dessus par des chargements complets de cigarettes, des citernes d’antigel anisé et des putains de camions de chagrins. En plissant les oreilles, on arrive à distinguer l’animal, dans la dépouille raplapla et patatrain, un peu, mais bon l’affaire est, si l’on ose dire, entendue. Ses fans s’en balancent, ils ne sont pas venus l’entendre, mais l’écouter et surtout le voir!

Des arrangements de cordes somptueux

Samedi soir, l’opéra Berlioz, au Corum, était plein comme un rade un soir de finale et l’ambiance y était à peine moins jouasse. Au coup d’envoi, c’est déjà le panard dans les travées, le bandana d’émail des sourires s’ajoutant illico à l’autre, le textile, rouge forcément. Renaud, lui, a sanglé sa bedaine dans une marinière, mis une veste et chaussé ses bottes à bascule blanches. Classe. Guiboles écartées façon Lucky Luke, il enquille les morceaux sans broncher, ou si peu, quand il ne cale pas sa bidoche sur un tabouret. Le spectacle est ailleurs : deux magnifiques quatuors à cordes féminins le soutiennent à cour et jardin, tandis que deux gars, très bien, le poussent dans le dos avec leurs piano et accordéon.

Le répertoire témoigne d’une belle générosité mais aussi d’une exigence de beauté, en mélangeant tubes obligatoires (que la salle est invitée obligeamment à chanter : Manhattan-Kaboul, Manu, Morgane de toi, Mistral gagnant, Dès que le vent soufflera, ce genre) et chansons un peu plus rares et systématiquement poignantes (La pêche à la ligne, Les cinq sens, Tant qu’il y aura des ombres…). Les arrangements sont somptueux, qui ne noient pas les mélodies sous le sirop d’érable de violonades fastoches mais cherchent toujours à en rehausser la beauté naturelle.

Cœur perdu, qu’il dédie à Cerise, son amoureuse avec laquelle les fans se sont fait prendre en photo avant et après le concert, est belle à tomber, C’est quand qu’on va où ou Morts les enfants de même. Et dussions-nous réveiller les rageux ce disant, l’honnêteté nous oblige à préciser que son chant s’est un tout petit peu amélioré au fur et à mesure de la soirée. Mais une fois encore, on n’était pas là pour ça mais pour voir Renaud, le gosse, le frangin, le poto bien accompagné et en bonne compagnie. Et ensemble se tenir chaud.

  

Source : Midi Libre