Pour être mordant en chanson, pas besoin de « gros mots » et de décibels

Le Soleil

Québec, vendredi 12 juillet 1991

VOTRE WEEK-END

Selon Renaud et Michel Rivard

Il y avait du monde au rendez-vous, hier, pour la dernière table ronde sur la chanson francophone, organisée par le Festival d’été. Et pour cause, puisque les chanteurs Renaud Séchan et Michel Rivard étaient invités à discourir sur le thème « La chanson mord-elle ? ». 


par FRANCINE JULIEN
LE SOLEIL

Jean-Robert Bisaillon, des French B., Fred Hidalgo, fondateur de la défunte revue Paroles et Musique, et François Blain, journaliste à la revue québécoise Chansons d’aujourd’hui complétaient la longue liste de représentants du milieu artistique, qui ont défilé depuis dimanche au Musée de la civilisation.

Pas nécessaire d’y aller de « gros mots » et de décibels pour être mordant en chanson, croient Renaud et Rivard. « C’est un cliché de dire que la chanson d’amour est inoffensive, affirme l’auteur de Don Quichotte appuyé par Renaud, qui ajoute qu’aujourd’hui, « l’amour est une valeur subversive ».

 
Les chanteurs Renaud Séchan et Michel Rivard étaient invités hier
à discourir sur le thème « La chanson mord-elle ? »

« On peut être plus mordant aujourd’hui, seul avec sa guitare acoustique, déclare Michel Rivard. Le terme rock ne veut strictement plus rien dire. Ça ne choque plus personne d’entendre une guitare qui distorsionne ; maintenant, on entend ça dans les commerciaux de bière. »

Plusieurs des invités au débat n’ont pas manqué de souligner que les chansons aux paroles plus dérangeantes avaient bien peu de place à la radio, sujet qui a d’ailleurs fait l’objet d’une autre rencontre, plus tôt cette semaine.

« La chanson dite mordante a moins le droit de passage à la radio », disait l’éditeur Fred Hidalgo, corrigé aussitôt par Renaud, qui remarquait que Miss Maggy, une chanson « plutôt mordante », est celle qui a passé le plus à la radio.

— C’est parce qu’il était question d’une étrangère, corrige à son tour Thierry Séchan, coanimateur avec Chantal Jolis.

— J’aurais pas réussi un truc pareil avec Mme Cresson, a reconnu le chanteur, sous les éclats de rire de l’assistance.

Fin des débats

Cette dernière rencontre fermait ainsi la série « La chanson francophone dans tous ses accents », volet implanté par le Festival d’été dans le but de permettre une réflexion publique par l’industrie artistique sur la chanson d’expression française.

Bizarre quand même que tout ça se soit déroulé à deux pas du Théâtre Petit-Champlain et en l’absence des représentants de ce dernier bastion de la chanson française à Québec…

   

Source : Le Soleil