1er décembre 2019
C’est à la terrasse couverte d’une brasserie parisienne que Renaud nous reçoit. L’artiste aux vingt millions de disques vendus répond humble et modeste aux questions sur son nouvel album, « Les Mômes et les enfants d’abord ». La discussion déborde sur sa santé, ses envies, sa nostalgie. Renaud se livre sans tricher. Entretien.
– Vous vouliez faire un album sur l’enfance depuis longtemps, pourquoi l’avoir fait maintenant ?
« Je vais citer Véronique Sanson, j’ai des idées dans la tête et je fais ce que j’ai envie ! C’était le bon moment. Sur ma dernière tournée, j’ai été marqué par les enfants de 8 à 12 ans qui accompagnaient leurs parents. J’ai fait ce disque pour eux… et pour leurs parents. Au final, c’est plus un disque sur l’enfance, qu’un disque pour enfants. »
– Écrire avec ce regard et ce vocabulaire d’enfant, c’était un jeu ?
« Oui, un exercice. J’ai pris plaisir à instiller les gros mots et les fautes de syntaxe pour faire marrer les mômes. D’où Les Z’Animals, les chevals et les z’hiboux. »
– Vous parlez avec nostalgie de l’enfance et de l’école, qu’est-ce qui vous plaisait le plus ?
« L’insouciance, l’innocence, nos jeux de gamin, les institutrices… Je tombais tout le temps amoureux d’elles ! Repenser aux années d’enfance, c’est une douleur. »
– Votre façon d’épeler L.O.L.I.T.A. rappelle LAETITIA de Gainsbourg. Vous y avez pensé ?
« Pas sur le coup, je m’en suis rendu compte après. C’est une coïncidence. Serge Gainsbourg a beaucoup compté pour moi. Il manque terriblement à la chanson française. C’était un ami, il m’appelait à deux heures du mat’ pour aller chez lui. On buvait des coups et on parlait toute la nuit. »
– Dans « On va pas s’laisser pourrir », vous faites de la prévention contre les drogues, l’alcool et le tabac. Pourquoi ?
« On m’a dit que c’était une chanson moraliste, mais ça me paraît important de faire cette morale aux enfants, pour les éloigner de ces poisons. »
– C’est vous qui avez choisi Zep pour illustrer l’album ?
« Oui, j’aime son univers, la sympathie et l’humilité qu’il dégage. Le Renaud qu’il a dessiné est sympa, on ne sait pas trop quel âge il a, ça me va bien ! »
« J’écris toujours régulièrement, même si j’avais déserté ce plaisir pendant sept ans d’errance. J’attaque déjà le prochain album. »
– Y aura-t-il une tournée ?
« Je ne sais pas, rien n’est prévu. Peut-être que je vais attendre le prochain disque. J’ai toujours envie d’être sur scène, même si je n’aime pas chanter. Ça dépendra du succès du disque. »
– Vous continuez d’écrire ?
« Oui, régulièrement, j’attaque le prochain album, doucement. Y’a pas l’feu ! Ce disque qui sort, je l’ai écrit en huit jours, en me levant à 5 h du matin pour faire une à trois chansons par jour. »
– Vous avez retrouvé ce plaisir ?
« Il ne m’a jamais quitté, mais je l’ai déserté pendant sept ans d’errance, d’alcoolisme et de mélancolie. Je suis revenu, tel le phénix qui renaît de ses cendres. Je viens d’écrire une chanson sur mon frère Thierry, décédé au début de l’année. C’était mon protecteur. »
– Tout le monde s’interroge sur votre santé : comment allez-vous ?
« Bien, j’ai arrêté de boire depuis dix mois, bientôt onze ! Maintenant je bois un apéritif sans alcool, le Bitter San Pellegrino. J’ai arrêté ce poison, c’était une question de survie. J’ai retrouvé la lucidité, contrairement aux années où j’étais un zombie. Par contre je continue de fumer, trois paquets par jour. C’est plus facile d’arrêter l’alcool que le tabac. »
– Votre voix vous échappe…
« Je la trouve pas mal sur ce disque, ça aurait pu être pire. Un fan m’a dit « Tu ne chantes pas juste ni faux, tu chantes vrai ! » »
– Savez-vous qu’au stade Bollaert à Lens, les supporters chantent un hommage aux mineurs sur votre chanson Hexagone ?
« Vous me l’apprenez, et ça me rend très heureux ! J’avais chanté dans Mon Amoureux que j’étais supporter de Lens, et je le suis toujours. Je me rappelle qu’ils chantaient aussi La Ballade nord-irlandaise, c’était magnifique ! »
Source : La Voix du Nord