La Montagne, avril 88
« Putain de camion », c’est deux faces (« de lune » et « de rat ») rassemblant douze chansons truffées
d’émotion, de poésie, de dérision, d’images et d’expressions colorées au vinaigre ou au tord-boyaux comme
seul Renaud sait en concocter :
« JONATHAN » : cœur zoulou et rythmique appuyée pour dire son admiration à Johnny Clegg tout en criant
son dégoût pour l’apartheid, mais aussi pour le sort fait aux Kanaks, aux Basques, aux beurs.
« IL PLEUT » : jolie ballade, jolie chanson d’amour pour Lolita. De la (très grande) veine des « Morgane de toi
» ou « Mistral Gagnant ».
« LA MERE A TITI » : c’est la cousine de « Banlieue rouge », la tante de « La bande à Lucien ». Un
extraordinaire exercice d’observation et de sociologie ponctué par un refrain débordant d’émotion.
« TRIVIALE POURSUITE » : le cri étouffé d’un homme fatigué. Les opinions politiques s’affichent encore et le
chanteur reste fidèles à ses idées. Mais il a perdu le goût de se battre pour les faire triompher. Bouleversant.
« ME JETTE PAS » : ou l’histoire d’un mec adultère qui implore le pardon. Pourrait devenir à Renaud ce que «
Ne me quitte pas » reste à Bruel.
« ROUGE-GORGE » : pour Robert Doisneau, poète libertaire, mais aussi et surtout pour Paris, ville sacifiée aux
bureaux et parkings. Treize ans après, la douloureuse suite de « Ecoutez-moi les gavroches ».
« ALLONGÉS SOUS LES VAGUES » : féroce pamphlet contre les chansons tiroirs-caisses, le Top 50, la télé,
les FM et les boîtes minables. Ça va grincer des dents dans le show-biz. Bien fait !
« CENT ANS » : dérisoire hymne à la vie, cette dévorante maîtresse, corrompue et mal famée, mais dont on
redoute tellement qu’elle nous quitte…
« SOCIALISTE » : « L’autostoppeuse » affiche ses opinions politiques. Et ce n’est guère plus ragoûtant que ses
charentaises ! « Comment veux-tu changer la vie si tu balises pour ton bien ? ». A bon entendeur…
« PETITE » : belle ode au public adolescent. Et aussi à Malik (Oussekine) Abdel (flingué à la Courneuve),
William (victime d’une bavure) et Michel (Coluche). Un blues qui blesse nos cœurs d’une langueur…
« CHANSON DÉGUELASSE » : « Comment résister à cet amour que Hugues offrait ? ». Un vocabulaire à se
rouler par terre et un refrain qui vous reste encore en tête trois jours après…
« PUTAIN DE CAMION » : l’hommage, le poing fermé et la rage contre l’injustice. Les yeux qui piquent et le
temps que l’on ne rattrapera pas. La messe est dite, tout est fini…
« J’espère que là-haut, t’as acheté un vélo… » (« Putain de camion ») : la mort de Coluche a bouleversé Renaud
et lui a inspiré bon nombre de réflexions.
Source : Le HLM des Fans de Renaud