Rarement un concert avait fait tant parler de lui avant même qu’il ne commence : celui de Renaud chantant les titres enregistrés dans son dernier CD composé uniquement de textes en patois du Nord. Un récital qui concluait le Festival « Wazemmes l’accordéon », commencé huit jours plus tôt.
La rumeur, une fois encore, avait gonflé l’événement, les jours précédents. On attendait une foule astronomique, on évoquait des débordements éventuels. Mais la réalité ne fut pas vraiment cela. Un public chaleureux, certes, et plusieurs milliers de personnes, moins sans doute que ce que l’on avait pu annoncer…
Quatre à cinq mille personnes se sont retrouvées sur le coup de 10 heures du soir sur cet énorme terrain vague entre la rue d’Iéna et la place de la Nouvelle-Aventure.
Services de sécurité à l’entrée et forces de police sont là pour parera toute éventualité. La foule, doucement, s’est infiltrée entre les barrières.
Depuis le début de la soirée, l’accordéon a repris ses droits au cœur de Wazemmes ; deux groupes se suivent sur le large podium installé au fond du terrain : « Wazem » et « Les frères Brozeur ».
Une brève pause, puis voici venu Renaud sur scène.
Blouson en cuir noir, tee-shirt rayé et foulard rouge autour du cou. Première chanson comme sur le disque, l’une des plus connues : « Tout in haut de ch’terril », l’histoire de celui qui passe ses vacances tout là-haut, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus y grimper. « Ça va mes gins ? ». Renaud l’affirme, il a enregistré ses chansons en patois du Nord, mais il n’est pas là pour parler en ch’timi. Point trop n’en faut.
Il dit, entre deux chansons, qu’il est content d’avoir pu participer, via la musique rock, à la réhabilitation de l’accordéon. Il salue « le maire de Wazemmes » et les organisateurs du festival, et visiblement, il est content d’être là. En face, il y a le maire de… Lille, Claude Berri et Cédric, le petit garçon que l’on voit en arrière-plan sur la pochette du disque. Ambiance Germinal indissociable de cette soirée qui fait suite à la longue rencontre de Renaud avec le Nord, à l’enregistrement du disque à Lille cet hiver.
Sur la scène, une dizaine de musiciens et de choristes; presque tous des « Premiers Prix du Conservatoire de Lille » et, dit Renaud, « Casadesus, n’aura plus rien ! » Tous des complices de ce disque aux accents du Nord.
Des chansons qui, en plein cœur de Wazemmes, auront fait revivre « El’pinsionnée », « Les tomates », « Le tango du cachalot » ou le souvenir de « ch’terril d’Rimbert » qui « est parti rogné par chés bulldozers ».
Autour du terrain où la scène, vue de loin, ressemble à un étrange navire dont le mât serait le clocher de l’église St-Pierre, des habitants du quartier se sont assis sur les appuis de fenêtres des maisons.
Comme autant de passagers, embarqués sur ce bateau, Renaud a chanté (pas ce soir-là), « c’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme ».
II a juré qu’il rembarquerait un de ces jours dans l’univers des chansons du Nord avec « Quand la mer monte » et d’autres titres « de chez nous ». À bientôt sur les quais de Wazemmes ou d’ailleurs !
Michel Berry
Source : Le HLM des fans de Renaud