Cahier C
LE WEEK-END
Québec, vendredi 20 janvier 1989
Dans les médias parisiens, on a abondamment loué le nouveau spectacle de Renaud Visage pâle attaquer Zénith, autant pour la qualité de la mise en scène que pour celle des chansons.
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À l’heure de Visage pâle attaquer Québec, le chanteur énervant n’avait pas derrière lui et ses huit musiciens et le décor écologique de sa tournée française, mais ses chansons gardaient tout le mordant et toute l’émotion que ses précédents passages au Québec pouvaient nous laisser espérer.
Si on peut reprocher quelque chose à ce spectacle (repris ce soir dans une salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre pleine à capacité pour la première d’hier) c’est d’ailleurs peut-être de nous avoir fait trop mécaniquement osciller entre la tendresse et la révolte.
Il n’y a peut-être que Renaud pour maintenir l’intérêt tout en cassant ses effets: juxtaposant par exemple La pêche à la ligne et L’Hexagone (qui commence ce pendant à avoir des allures de pièces de musée).
Heureusement, d’autre part, il aime bien se moquer de lui-même en même temps que des autres, avec ses commentaires appuyés par des exemples puisés dans une actualité très québécoise.
Sinon, cette foule plutôt sage (comptant presque autant d’adultes que d’adolescents) aurait pu trouver très longues certaines interventions surtout quand ça prenait la forme de dialogues improvisés avec les choristes.
C’est surtout en deuxième partie, amorcée avec une de ses plus belles chansons. Mistral gagnant que le spectacle a pris un peu de cohésion, pour arriver à un beau moment d’intimité à l’heure des rappels. L’une des chansons les plus chaudement ovationnées a été le célèbre Morgane de toi.
Mais parlons surtout des nouvelles chansons (celles du dernier microsillon Putain de camion) puisqu’il les presque toutes chantées hier, depuis le Cent ans de l’ouverture, jusqu’à Me jette pas en passant par La mère à Titi, Triviale poursuite, Socialiste et Allongés sous les vagues.
Encore là. beaucoup de contradictions teintées d’un certain humour noir.
Mais Renaud est comme ça. Et une soirée avec lui, c’est comme une série de coups de foudre.
LOUIS TANGUAY
Le Soleil
Source : Le Soleil