Octobre 1977
⚫ « Je suis une bande de jeunes à moi tout seul… » chante Renaud avec son dernier 33 tours. Il le proclame avec assez d’entrain et d’humour souriant pour convaincre. Il le prouve aussi dans un autre domaine que la chanson puisqu’en deux ans et demi (l’intervalle de temps qui s’est écoulé entre la sortie de son premier album et le second) il a eu l’occasion de jouer la comédie au café-théâtre, et d’incarner plusieurs personnages dans des dramatiques télévisées.
L’un des derniers descendants de la famille aristocratique de Au plaisir de Dieu, c’était lui. Il fut aussi un jeune trafiquant dans Madame Ex (dramatique inspirée d’un roman autobiographique d’Hervé Bazin). Voyou ou fils de famille, Renaud prête son visage d’adolescent tourmenté à celui de la jeunesse.
Son sourire mince sait se faire canaille ou sagement réservé. Ce qui l’anime, ce qui l’inspire, c’est le besoin d’exprimer à sa manière les élans et les préoccupations des jeunes de son âge. Enfant du béton et de la solitude, gavroche de banlieue, il a gardé la nostalgie des rues, des cafés à juke-boxes et des terrains vagues ; des chevauchées à mobylette et de l’exaltant appétit de liberté que l’on connaît à vingt ans, à la sortie du bureau ou de l’usine. On peut le croire sur parole quand il chante Laisse béton, Adieu minette, Buffalo Débile ou La boum, et trouver avec lui, dans l’ironie du ton, du regard et du rythme, un remède aux désillusions et à l’amertume.
Chanteur ou comédien, pour lui il n’y a pas de différence :
— A vrai dire, c’est à la comédie que je pensais au début, disons en 1970. En travaillant avec Romain Bouteille ou Coluche, au café-théâtre, j’ai compris qu’il n’y avait pas de cloisons étanches entre les moyens d’expression. C’est pour cela que je retrouve avec plaisir mes camarades du Marais (avec qui j’ai créé l’an dernier La revanche de Louis XI) lorsque je ne suis pas en tournée.
Il vient de participer à une émission de variétés, de style comédie musicale, avec Françoise et Bernard Deflandre, producteurs-réalisateurs de la série télévisée « Arouapéka ». Avec eux, il avait chanté pour la première fois à la télévision Amoureux de Paname, en 1975.
C’est vrai que les rues de la capitale sont les artères où continue de battre le cœur de Renaud. Les « Puces » restent son terrain d’exploration favori. Il y trouve les bibelots, les affiches, les objets baroques qui meublent son univers familier, du côté de la Bastille. Et quand il a envie de prendre l’air (un air de danse de préférence) il empoigne sa guitare, ou bien enfourche sa moto pour aller retrouver La bande à Lucien.
Source : Nous Deux