RENAUD : « Je ne voudrais pas tomber de haut »

Le Journal d’Elbeuf

16 février 1979

Dans sa loge avec ses musiciens, Renaud fait le point. Personne n’est content : « on s’est trop souvent « planté », si seulement tu avais respecté l’ordre des chansons ! » lui dit le guitariste, tandis que le batteur renchérit : « Et dire que dans trois semaines on passe au Théâtre de la Ville ! » « Pourtant, remarque un admirateur, je vous ai trouvés très bons ce soir. » Et l’orchestre de se lancer dans des explication» techniques…

… Renaud n’aime guère les interviews, mais, une canette de bière dans la main droite et une cigarette au bout des doigts, il nous fait signe : « O.K. qu’est-ce que tu veux savoir ? »

— Être fils de P.D.G., faire payer 48 francs l’entrée et chanter la banlieue, cela n’est-il pas contradictoire ?

— Fils de P.D.G., c’est ce que disent les journaux. Jusqu’à preuve du contraire, mon père est prof d’allemand. Quant au prix des places, je n’y suit pour rien. D’habitude, je précise que le tarif ne doit pas dépasser 25 F. Mais l’organisateur n’a pas voulu prendre de risques. Ça ne va pas se passer comme ça !

— En chantant la banlieue et tes loubards, vous avez trouvé le bon filon…

— Non, pour moi c’est quelque chose de naturel. J’ai vécu Porte d’Orléans et j’ai toujours plein de copains à Argenteuil. C’est un monde que je connais bien parce que j’en fait partie. Je ne suis pas un zonard de pacotille.

— Et l’argent, dans tout cela ?

— Je ne chante pas pour le fric, mais J’avoue que c’est toujours bon d’en avoir.

— La rivalité avec Sardou n’est-elle pas une astuce commerciale ?

— Pas du tout. Je déteste Sardou et je ne me gêne pas pour le faire savoir. D’ailleurs, je ne suis pas pressé de le rencontrer sur un plateau parce que je n’ai pas fait de sport de combat…

— Heureux d’être une vedette ?

— Non. J’en ai un peu marre, j’aime chanter mais tout ce qui entoure ce métier m’exaspère : les contrats, les interviews, les photos et tout… D’ailleurs je sens que je ne vais pas continuer longtemps. Je ne voudrais pas tomber de haut…

  

Source : Le Journal d’Elbeuf