Mai 1992
France-Soir vous distrait | Spectacle
AU CASINO DE PARIS À PARTIR DU 11 MAI
« Est-ce que je suis si peu dangereux, si peu subversif pour que mes textes n’effraient personne ? »
Cette interrogation métaphysique de Renaud, suite à un déferlement d’éloges tous horizons confondus, c’était en 1980. Quatre semaines d’enfer à Bobino avec au programme de la nouvelle idole au visage pâle quelques petites perles réalistes des aînés Fréhel, Bruant et Montéhus.
En fait, personne n’avait les (…). Mais on l’aimait déjà gros comme ça le petit poulbot anar au blouson noir. Qui (…) mélange de timidité et de (…), de tendresse, d’humour et de (…) pourrait (…) ?
FLEUR BLEUE. Hiver 1992, sort son album « Marchand de cailloux ». Renaud m’a rien perdu de son œil aigu et de son côté fleur bleue qu’il revendique. Mais, cette fois, ce n’est pas lui qui pose les questions. « Suis-je si peu dangereux ? » Sinon des nostalgiques de la première heure qui trouve l’ « énervant » sérieusement adouci. À la veille de ses Casinos de Paris, confessions amusées de l’ex « zonard déchaîné ».
FRANCE-SOIR. – Vous êtes-vous assagi ?
R. – J’ai pas l’impression de m’être adouci ni d’être moins rebelle. « Marchand de cailloux » (allusion à l’intifada) n’a vraiment rien d’un album tranquille. Mais peut-être qu’il y a dix ans mes révoltes étaient plus sauvages, moins embarriquées dans des causes militantes et politiques.
F.-S. – Où en êtes-vous avec Tonton après la chanson du même nom ?
R. – J’ai (…)
F.-S. – Emmanuelle Béart aussi a besoin de vous semble-t-il pour lui écrire des chansons ?
R. – Ça, c’est une chose qui me touche beaucoup. Parce que ce n’est pas un caprice. Ça faisait longtemps qu’elle avait envie de chanter. Mais elle ne voulait pas se lancer si ce n’était pas moi qui lui écrirais les chansons. En attendant, j’ai eu le culot de lui demander de jouer dans mon clip « P’tit voleur » réalisé par Lewis Furey qui sort le 10 mai. Mais très vite je m’attaque à ses chansons. Ça m’intrigue de savoir si je serai capable d’écrire pour quelqu’un d’autre sans faire du Renaud tout en gardant mon identité. Me mettre dans la peau d’une actrice en plus.
F.-S. – Il n’avait pas été question pour vous d’écrire pour Vanessa Paradis ?
R. – Ha, si. Et ça me motivait beaucoup. À l’époque, on avait demandé à Gainsbourg et à moi. Mais la condition de Gainsbourg était d’écrire tout l’album ou rien. Il m’a téléphoné désolé, presqu’en pleurs, s’excusant : « Écoute mon vieux, on peut pas mélanger les genres. Toi, tu es plus écriture populaire. Moi j’ai une écriture plus aristocrate. Les gens vont inévitablement comparer. C’est ridicule. » Tout ça me paraissait d’une grande logique. J’ai cédé.
F.-S. – Tout de suite après la scène, le cinéma avec le tournage de « Germinal » sous la tutelle de Claude Berri.
R. – Il a dû me tanner pendant deux ans pour ça. Je n’étais pas sûr d’être assez impudique. Non parce que je suis torse nu et couvert de tatouages. Mais parce qu’exprimer des émotions que je n’éprouve pas, même si Étienne Lantier est un utopiste (…). Et comme Berri m’a convaincu que j’étais le personnage plus qu’aucun autre acteur français, là aussi, j’ai cédé.
F.-S. – Ce Casino après le Zénith et quatre ans d’absence ?
R. – Ça va être très beau à regarder. Les lumières un peu délustrés et étranges sont diffusées par des vieux (…). Une belle trouvaille de Rouveyrolles. (…) Quant aux chansons, c’est surtout essentiellement des chansons d’amour. Peut-être parce qu’après avoir fait le tour des révoltes, l’amour c’est la seule vérité.
Monique PRÉVOT
Source : France-Soir