Renaud l’anar vote pour Poutou au premier tour et contre Le Pen au second

Le Figaro

Le chanteur Renaud votera Philippe Poutou à la présidentielle 2022. AFP/Philippe Lopez

Le loubard poète de la chanson française ne laisse pas «béton» ni la politique, ni la gauche et incite tous les jeunes à aller voter.

On sait depuis Miss Maggie, sa chanson-pamphlet contre Margaret Thatcher que les idées conservatrices n’ont pas l’heur de plaire à Renaud. Le loubard poète, celui qui a donné ses lettres de noblesse au verlan avec son refrain Laisse Béton, chanteur engagé à gauche depuis ses débuts, a déclaré mercredi, à quatre jours du premier tour, qu’il voterait pour Philippe Poutou, leader du Nouveau parti anticapitaliste, à la présidentielle. Cette décision apparaît rare dans une campagne où les grands noms de la chanson se font discrets, contrairement aux années 1980.

Sur RTL, Renaud a revendiqué une conception du civisme avec cet engagement: «Bien sûr, je vais voter, je ne suis pas du camp des abstentionnistes. Je vais voter au premier tour pour choisir un candidat, le deuxième pour en éliminer un ou une candidate.» Au premier tour, Renaud, qui sortira le 6 mai Métèque, album de reprises, votera pour le «candidat le plus à l’extrême gauche, quasiment un anar, Philippe Poutou (NPA)». Au deuxième tour, l’interprète de Mistral gagnant votera «contre, pas pour, contre Le Pen, j’incite tous les jeunes à aller voter».

De l’anarcho-mitterrandisme à … l’anticapitalisme

En 1988, en signant la tribune Tonton, laisse pas béton, Renaud participa à la «Tonton-mania», mouvement en faveur de la réélection de François Mitterrand. La même année, dans sa chanson Socialiste, on entendait «Moi j’étais rien-du-toutiste, anarcho-mitterrandiste. J’sais même pas si ça existe, mais ça m’excite».

Dans les années 1980, les chanteurs de premier plan n’hésitaient pas à s’afficher tels France Gall, Charles Trénet, Jacques Higelin ou Barbara pour Mitterrand. On se souvient aussi de Johnny avec son t-shirt «Giscard à la barre», puis sa présence aux meetings de Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy.

Peu sont montés au créneau pour la campagne présidentielle de 2022. Jacques Dutronc a déclaré sur RTL choisir Fabien Roussel pour le premier tour, dans son style inimitable. «J’ai fait une procuration mais je connais bien les gens là-bas (en Corse, où il réside) et ils ne vont pas voter ce que j’ai demandé, c’est-à-dire le Roussellement», s’amuse-t-il. Bernard Lavilliers s’est aussi déclaré «proche» de Fabien Roussel dans le journal La Marseillaise.

Lors des meetings, rares sont les chanteurs connus qui se sont montrés, à l’exception du groupe de rap Ärsenik ou de la chanteuse Yael Naim à l’occasion d’un rassemblement de Yannick Jadot au Zénith de Paris. Des rappeurs renommés ont en revanche relayé dans leurs morceaux la peur d’une France fracturée à l’approche de la présidentielle. OrelSan a frappé fort fin 2021 avec son single L’Odeur de l’essence, une attaque, selon lui, contre l’amalgame polémique-extrémisme-outrance servi dans les débats politiques.

Enfin, pour son grand retour, le duo Bigflo & Oli vient de sortir un morceau, Sacré bordel, hymne au vivre ensemble dans un pays cosmopolite. «Tout c’qui est sûr, c’est qu’j’suis Français, que mes grands-parents ne l’étaient pas. Mais c’qui compte, c’est plutôt l’arrivée ou la ligne de départ ?», entonnent-ils. Ou encore, «Dans le grimoire, y’a les Gaulois, y’a les chevaliers. Mais dans la cuisine, y’a ma grand-mère et ses tatouages berbères effacés». Une façon détournée de défendre leur conception politique.

Quand Renaud chantait Miss Maggie … en 1985

 

  

Source : Le Figaro