Renaud : « L’enfance ne m’a jamais quitté »

Gala

N° 1630 / 5 septembre 2024

INTERVIEW

PAR VIRGINIE PICAT

Jo Di Bona, l’artiste « pop issu de la scène graffiti » a utilisé la couverture de Marche à l’ombre, le 4e album de Renaud (1980) comme toile de fond pour illustrer le titre Morgane de toi.

A travers un très bel ouvrage au bénéfice de l’Unicef, des artistes contemporains ont illustré quelques-uns des plus célèbres titres du chanteur populaire. 72 ans et une nostalgie intacte.

Un texte, un dessin. Tel est le concept de Renaud, des mots et des images (éditions Alternatives), en librairie le 5 septembre, qui propose vingt chansons de Renaud illustrées par des signatures de renom : Hervé Di Rosa, Robert Combas, Ernest Pignon-Ernest ou encore Jean-Michel Alberola. Et si cette belle initiative est au profit du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), qui intervient dans plus de 190 pays et territoires, ce n’est pas un hasard : le thème de l’enfance et de ses paradis perdus a toujours fait partie des grandes sources d’inspiration du chanteur.

GALA : Vous avez toujours été un homme de combat. On se souvient de votre titre Ethiopie, en 1985. Aujourd’hui, ce sont aux enfants que vous souhaitez porter secours par l’entremise de l’Unicef. Ressentez-vous une urgence particulière à leur venir en aide ?

RENAUD : Oui, j’ai toujours été touché par la cause des enfants, leur souffrance, leur manque de perspective en l’avenir. Si une chanson ou un don peut faire changer les choses, alors je suis prêt à m’engager comme je l’ai toujours fait.

GALA : Dans cet ouvrage, vous avez souhaité que cela soit les œuvres d’artistes peintres et non pas de bandes dessinées, votre passion de toujours, qui illustrent vos titres. Vos goûts picturaux ont-ils changé, évolué ?

RENAUD : Je me suis intéressé à la BD durant des années mais c’est Claude Berri, le réalisateur de Germinal qui m’a offert mon premier grand rôle au cinéma. Il m’a aussi initié à l’art contemporain. J’ai visité les musées d’Art moderne de plusieurs villes de France avec lui, notamment celui de Saint-Etienne, et cela m’a fait découvrir le Street art.

GALA : Y a-t-il parmi ces œuvres, une peinture qui vous touche plus qu’une autre ? Qui vous ressemble davantage ?

RENAUD : Celle d’Ernest Pignon-Ernest sur la couverture [elle illustre aussi Mistral gagnant, ndlr]. Elle me rappelle mon enfance à travers ce portrait de moi.

GALA : Le choix des titres a-t-il été compliqué à faire ? Ou chaque chanson vous est-elle apparue comme une évidence…

RENAUD : J’ai établi une liste en lien avec l’enfance et la nostalgie d’un monde meilleur. Mes choix de départ ont été complétés par certains artistes pour aboutir à cette somme.

GALA : Allez-vous faire des dédicaces de cet ouvrage collectif pour que votre public ait la joie de vous rencontrer ?

RENAUD : J’en ferai avec plaisir le soir du vernissage, qui a lieu le 5 septembre à la mairie du 13e arrondissement de Paris.*

GALA : Les jeunes années ont toujours occupé une place de choix dans vos chansons, êtes-vous à jamais nostalgique de ce paradis perdu ? Qu’avez-vous conservé de l’enfant en vous ?

RENAUD : Une nostalgie qui me tient chaud, à travers des photos, des souvenirs, des anecdotes, des chansons comme Morgane de toi, Mistral gagnant, La pêche à la ligne, Morts les enfants…

GALA : Avez-vous le sentiment d’avoir transmis une âme d’enfant à votre fille aînée Lolita ?

RENAUD : Oui, elle aussi est bercée par ce goût. A 44 ans, elle est déjà nostalgique de ses 10 ans…

« Chacun mérite une chance égale de s’épanouir, d’apprendre, d’être en bonne santé et heureux », défend Renaud, qui pose ici devant les œuvres (ci-dessous). Le chanteur donnera un miniconcert lors du vernissage de l’exposition, le 5 septembre à 19 h, dans la salle des fêtes de la mairie du 13e arrondissement de Paris.

« MON FILS MALONE ? J’AIMERAIS BIEN AVOIR DAVANTAGE D’ÉCHANGES AVEC LUI… MAIS SA MÈRE EST TRÈS POSSESSIVE »

GALA : Retrouvez-vous dans votre fils Malone, des traits du petit que vous étiez ?

RENAUD : Oui, infiniment. Notamment dans le fait qu’il fasse de la poterie, comme j’en ai fait, et comme j’ai envie d’en refaire.

GALA : Il a fêté ses 18 ans le 14 juillet dernier. Vous rappelez-vous de vous à cet âge-là ?

RENAUD : Bien sûr ! Je fréquentais un café à Montparnasse, Le Bréhat, avec mes potes du lycée Montaigne…

GALA : Que lui racontez-vous de la vie, ses joies, ses peines, ses errances ?

RENAUD : J’aimerais bien avoir davantage d’échanges avec lui mais malheureusement je n’ai pas trop de contacts car sa mère est très possessive. Je ne dis pas cela de façon gratuite, mais simplement parce que c’est la triste réalité.

GALA : On dit qu’avec le temps, l’enfance nous « retombe » dessus. C’est votre cas ?

RENAUD : Absolument, elle ne m’a jamais quitté.

GALA : Qu’est-ce qui vous émeut le plus chez un enfant ?

RENAUD : L’innocence, la malice, la sincérité, la cruauté parfois.

GALA : Et que jugez-vous insupportable à propos de l’enfance ?

RENAUD : Le silence, le mensonge, l’abus.

GALA : Vous vous êtes remarié le 4 mai dernier avec Cerise. Dire « oui » à nouveau, c’est aussi retrouver l’insouciance de ses premières années ?

RENAUD : Non, c’est ma vie d’adulte. Même si en plus de notre amour, une complicité d’enfants nous unit Cerise et moi.


* Exposition Renaud, Des mots et des images, du 2 au 14 septembre à la mairie du 13e, 1 place d’Italie, 75013 Paris. Les œuvres originales y seront vendues aux enchères le vendredi 13 septembre.

Source : Gala (ici et ici)