Renaud « Marchand de cailloux »

La Nouvelle République

28 octobre 1991

Dans son nouvel album, le chanteur « épingle le président de la République ».

Renaud

QUl aime bien châtie bien : « Tonton, laisse pas béton », s’était écrié Renaud en 1988 en demandant à François Mitterrand de se représenter à l’élection présidentielle. Trois ans plus tard, dans son dernier album qui sort aujourd’hui (« Le Marchand de cailloux », Virgin), dans une chanson intitulée « Tonton », la « chetron sauvage » épingle le président de la République avec la verdeur qui lui est familière.

« Tonton est colère,
Tout va de travers,
L’histoire, la gloire, tout foire.
Parc’que ce soir
Le vieil homme a, c’est dur
Un caillou dans sa chaussure
Un vieux rhume qui dure… »

La chute de la chanson illustre la désillusion d’un artiste qui se sera longtemps refusé à faire partie des « déçus de la gauche », même s’il n’a jamais cédé au virus de la « tonton-mania » qui a frappé plus d’un de ses confrères. A l’approche de la quarantaine (seuil symbolique qu’il franchira courant 1992), Renaud enfonce même un peu plus le clou dans « Le Tango des élus », une chanson qui aurait pu être écrite par son ami Coluche.

Imprécateur

Avec ce nouvel album fortement marqué par la musique et les rythmes irlandais, le « chanteur énervant » renoue avec la veine imprécatrice qui a fait sa réputation. L’intifada (« Marchand de cailloux », premier 45 tours extrait du disque), les médias (« L’Aquarium »), la corrida (« Olé »), l’Ireland (« La Ballade nord-Irlandaise »), le rallye Paris-Dakar (« 500 Connards sur la ligne de départ ») fournissent à Renaud matière à quelques sorties virulentes, jusqu’à Yannick Noah, non cité, mais facilement reconnaissable en sportif promu rock-star d’un été dans « Ma chanson leur a pas plus ».

Alors, qu’est-ce qui console finalement Renaud de toutes ses déceptions ? Lola, sa fille, bien sûr (« C’est pas du pipeau »), ce que chacun savait depuis son hymne à l’amour paternel (« Morgane de toi ») et la pêche (« Tant qu’il y aura des ombres »), chanson qui clôt l’album.

  

Source : La Nouvelle République