N° 1832, 6 juillet 1984
BOOM SUR LA MUSIQUE
Renaud mène le bal de la chanson qui parle au cœur
Ils sont nés sur les barricades de Mai 68, mais ils ont pris le temps de régler leurs escarmouches d’étudiants contestataires. A cette époque, certains chantaient déjà des textes « engagés », mais on n’entendait pas leurs paroles. Le rock d’outre-Manche et d’outre-Atlantique avait envahi l’Hexagone et on n’écoutait que la musique. Et puis, ils ont mûri… Aujourd’hui, la N.c.f. (nouvelle chanson française) est devenue un label et elle fait son entrée au ministère de la Culture qui, pour la première fois, lui accorde des subventions…
Ils s’appellent Jacques Higelin. Julien Clerc, Yves Duteil, Renaud, Axelle Bauer, Alan Souchon, Bernard Lavilliers et Pierre Bachelet auteur, compositeur et interprète du bonheur qui a vendu plus de 5 millions de disques en trois ans. Ils chantent la tendresse et les loubards, la solitude et les corons du Nord, la famille et les enfants, les impressions, les coups de gueule, les petites histoires de la vie quotidienne. La bluette ne fait plus recette. Aujourd’hui, la chanson est l’expression du réel. Tragique, comique, parfois. Mais sans gravité excessive, sans message pompeux ou politico-écologique. One ne refait plus le monde, on le vit. Cette génération d’artistes ne ressemble à rien de ce qui se faisait auparavant. Elle ne se reconnaît à peu près aucun modèle. Elle forme une école, celle du nouveau réalisme. mais elle reste tout de même plus proche des rythmes des Beatles que des mélodies de Trenet.
Renaud s’est fait tatouer les prénoms de sa femme et de sa fille sur les bras. « En 68, j’étais gauchiste professionnel. Aujourd’hui, je suis le chantre des loubards », dit-il. Il envisage de se présenter à l’élection présidentielle de 1988.
Source : Paris Match