Il a composé une chanson sur Ingrid Betancourt, il enregistre un nouvel album et publie aujourd’hui un livre-CD pour enfants, « le Petit Oiseau qui chantait faux ». Rencontre avec Renaud, un jeune marié de 53 ans très amoureux.
Par Propos recueillis par Catherine Balle
A travers « le Petit Oiseau qui chantait faux », Renaud dévoile son grand cœur et son amour de la liberté.
Le 2 novembre 2005 à 00h00
D’EMBLÉE, il nous déroute. On arrive en avance à la Closerie des Lilas (Paris VIe), son adresse fétiche. Renaud est assis à sa table habituelle, devant un café et… Il nous invite alors à feuilleter avec lui les quotidiens du jour. Avec humour et esprit, il commente l’actualité. Puis, au bout de quelques minutes, il lève la tête. L’interview peut commencer.
D’où est venue l’idée du « Petit Oiseau… » ?
Renaud.
Il y a quinze ans, j’ai écrit un conte, « la Petite Vague qui avait le mal de mer ». Beaucoup d’enfants l’avaient aimé et ça m’avait touché. J’ai donc eu envie de réécrire une histoire enfantine. Un jour, on m’a demandé pourquoi les oiseaux chantaient toujours juste. Alors j’ai imaginé un oiseau qui chantait faux… Les mômes comprennent mes textes parce que je ne les prends pas pour des cons et que j’ai un langage quotidien. Mais je m’adresse aussi aux adultes qui ont gardé une âme d’enfant.
Etes-vous nostalgique de votre enfance ?
Totalement. Je ressens un coup de poignard dans le cœur dès que je pense à mon enfance ou à celle de ma fille, Lolita (qui a 25 ans). Mon enfance était douce comme le miel, auprès de 5 frères et sœurs et de parents aimants.
Ce conte paraît au moment où vous rêvez d’être à nouveau père…
(Sourire) Oui, le plus tôt possible !
Comme celle de votre « Petit Oiseau », votre voix est fragile…
C’est mon handicap majeur et ma force principale. Quand j’ai commencé ma carrière, je ne savais pas chanter. J’avais une voix de fausset, nasillarde, chevrotante. Celle d’un ado qui n’a pas encore mué. Aujourd’hui, j’ai la voix éraillée, fatiguée, rocailleuse et fausse de celui qui a trop vécu, trop souffert, trop fumé, trop aimé… Entre les deux, il y a eu une époque où je n’ai pas trop mal chanté : entre 1980 et 1995. Mais au moins, ma voix est inimitable !
Vous venez de composer « Dans la jungle », une chanson sur Ingrid Betancourt…
Quand mes idées et mes sentiments étaient noirs, je n’avais plus envie de lutter contre la misère du monde. Tout ce qui m’intéressait, c’était ma solitude, mon chagrin et ma dépression. J’ai chanté tout cela dans mon dernier album, parce que mes textes ont toujours dit ce que j’avais sur le cœur. Mais je regrette que « Boucan d’enfer » soit si nombriliste… Aujourd’hui, j’ai retrouvé la joie de vivre grâce à ma femme, Romane. Mais mon bonheur ne sera pas complet tant qu’il y aura des gens en prison, des enfants qui crèvent de malnutrition, d’esclavage sexuel…
Votre prochain album sera engagé ?
Oui. Parmi les 22 chansons, il y en a une intitulée « J’ai retrouvé mon flingue » : c’est la suite, vingt ans après, de « Où c’est qu’j’ai mis mon flingue ? ». J’y dégomme tous les intégristes et les George Bush. Mais il y aura aussi des chansons d’amour : une sur ma fille (« Adieu l’enfance »), une sur l’enfant à venir (qui aura un prénom irlandais mixte, « Malone ») et une sur ma femme (« Danser à Rome », l’anagramme de Romane Serda). L’album s’appellera « Dans la jungle ». Parce que sauver Ingrid est une priorité et parce que ce titre résume bien l’idée que je me fais du monde.
A quoi ressemble votre vie aujourd’hui ?
Ma femme et moi, on est des saltimbanques. On voyage entre Londres, où elle enregistre son album, Bruxelles, où je fais le mien, Paris, le Sud… Après la parution de mon disque, j’aimerais me poser. J’ai commencé un récit de mes années noires et de ma renaissance. Je voudrais aussi écrire un scénario et de nouvelles chansons.
Il me faudrait des journées de 100 heures pour faire tout ce dont j’ai envie… L’amour m’a redonné la frénésie de l’écriture.
Source : Le Parisien