Renaud réussit son retour sur scène, pour la première date de sa tournée

Le Parisien

Culture & loisirs, Musique

Par Éric Bureau, envoyé spécial à Avignon (Vaucluse) 

Le 25 janvier 2023 à 06h56, modifié le 25 janvier 2023 à 08h47

Six ans après sa dernière tournée, le chanteur de 70 ans remonte sur scène avec un concert intimiste, où il revisite son répertoire accompagné d’un piano, d’un accordéon et de huit violons et violoncelles. Nous avons assisté mardi à sa première date, à Avignon, et c’était une bonne surprise.

Avignon (Vaucluse), mardi soir.
Le public du chanteur lui est resté fidèle, concluant chaque chanson par une ovation et des «Renaud on t’aime». LP/Eric Bureau

On pensait ne jamais revoir Renaud en concert. Après son très long Phenix Tour, achevé il y a six ans, il nous a d’abord annoncé en septembre 2021 prendre sa retraite scénique, puis a retrouvé l’envie l’an dernier tout en nous disant vouloir attendre d’avoir de nouvelles chansons… Puis, après avoir fêté son 70e anniversaire en mai dernier, il a pris tout le monde de court en novembre en annonçant une « tournée en toute intimité » dès cet hiver et pour une trentaine de dates en France, Belgique et Suisse jusqu’à fin août, intitulée non sans autodérision « Dans mes cordes ». Car tout le mon­de le sait, à commencer par Renaud, ses cordes vocales sont très abîmées. Et sa santé est à géométrie variable.

« On avait tous une crainte, on ne va pas se mentir… »

Autant dire que mardi soir, les fans sont partagés entre exci­tation et inquiétude en entrant dans la Scala, à Avignon (Vau­cluse). Les 600 sièges sont réservés depuis longtemps. Les prochains concerts affi­chent eux aussi complets. Renaud s’est préparé avec sérieux. Mais toujours plus anxieux, il n’a donné aucune interview et aucune invitation pour les journalistes sur ses premières dates.

Nous en avons trouvé une sur place… Et nous sommes comme ses fans dans l’expectative lorsque, à 20 h 5, la lumière s’éteint et sa silhouette amincie apparaît à contre-jour. L’ovation est immédiate. Derrière lui, six violonistes, deux violoncellistes, un accor­déoniste, le pianiste et chef d’orchestre Alain Lanty lan­cent « Cent Ans ». « J’ai cent ans et j’suis bien content/J’ai encore mal aux dents/Mais la souffrance c’était très rassurant/Ça n’arrive qu’aux vivants », chante Renaud sur cette pépite de 1988 tirée de l’album « Putain de camion ».

Joli pied de nez. Il se posi­tionne au-devant de la scène, debout, les jambes légèrement arquées, en costume sur sa marinière rouge, camarguai­ses et jean noir. Sa voix peine sur « Le petit chat est mort » et « la Pêche à la ligne ». Mais le public est là, concluant chaque chanson par une ovation et des « Renaud, on t’aime ».

Tout le monde l’accompa­gne sur « En cloque ». Renaud tient bon la barre et commen­ce à trouver son rythme de croisière. Sa voix est livrée brute, sans effets, avec ses gros défauts mais aussi son émotion. Il ponctue chaque titre d’un remerciement. Il avoue avoir encore un peu le trac. « Pas grave », lui lance une fan. Sourire. « Ça va ? » demande-t-il au public. « Et toi ? » lui renvoie un fan. « Ouais », lâche Renaud.

L’artiste est porté par le public mais surtout par ses musiciens. Le décor, sobre et élégant, fait guinguette. Il res­sort plusieurs raretés, telles « Dans ton sac » et « Tant qu’il y aura des ombres », extraites de « Marchand de cailloux »… publié il y a trente-deux ans ! Il offre cette jolie version avec guitare et accordéon à Cerise, dont c’est « la chanson préfé­rée ». Cette quadra originaire de Loire-Atlantique est la compagne de Renaud depuis neuf mois. Ils ont pris récem­ment un pied-à-terre à Rezé, près de Nantes. Dans la salle, elle est assise près de Domini­que, sa première femme, et de David Séchan, son frère jumeau.

Lolita, sa fille, n’est pas loin. II lui dédie « Morgane de toi », qu’il a écrite pour elle il y a quarante ans. Elle retient son souffle pendant « Mistral gagnant », Himalaya que son père gravit courageusement en piano-voix dans un silence impressionnant, et se lève d’un bond, comme le reste du public, pour « Dès que le vent soufflera » et « la Ballade nord-irlandaise».

Les « Renaud, Renaud, Renaud » scandés comme au stade ne serviront à rien après une heure vingt-cinq et 20 chansons, enchaînées sans temps mort. « C’était un peu court, réagissent à la sortie Kevin et Manon, 32 ans, venus de Paris et de Brest. Mais on était tellement contents de le revoir, on pensait qu’il ne remonterait jamais sur scè­ne… Et on est épatés par sa voix. On avait tous une crainte, on ne va pas se mentir… Mais elle était limite meilleure que lors de sa dernière tournée. »

  

Source : Le Parisien (ici et ici)