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Le chanteur fatigant fait du mal à son répertoire en le boxant dans les cordes. Heureusement, il y a de la diagonale dans le violoncelle d’Edgar Moreau et de la lumière dans le saxo de Louis Billette.
Renaud
Chanson Chaque nouvelle sortie discographique de Renaud, pour qui l’a aimé, soulève la même question: faut-il en parler ou recouvrir la scène du crime d’un linceul pudique? Depuis au moins dix ans, la voix alerte du titi des faubourgs ressemble au râle de Grosminet qu’on estourbit, rendant son écoute même bienveillante objectivement douloureuse.
Mais ce coup-ci, c’est «dans ses cordes», ment le titre: pour jouer ses tubes, le bougre a rameuté un orchestre symphonique, ce qui est rarement une bonne idée même pour un artiste au sommet de ses moyens. Avec un Renaud en mode catarrheux, c’est tout simplement le supplice. On lui en veut de faire subir à la merveilleuse «Pêche à la ligne» un sort aussi laid. À quoi bon? La voix est rauque, atone, saucissonnée phrase par phrase, mot par mot. Pire: piquée à l’autotune pour en creuser les reliefs et y extirper le fantôme d’une mélodie! Ce mariage de cordes (celles qui le suivent en tournée) déversées comme du miel tiède sur la voix death metal frise l’expérimental mais assure l’indigestion.
Quitte à cautionner une opération mercantile, autant se rabattre sur la réédition en vinyle de ses années Polydor (1975-1982), soit ses meilleurs albums, ceux de la zone. FBA
«Dans mes cordes», Renaud (Warner)
Source : Tribune de Genève