Renaud, une vie en « live » à la Philharmonie

Les Echos

Publié le 16 oct. 2020 à 16:00Mis à jour le 16 oct. 2020 à 16:04

La « Putain d’expo ! » revient sur la carrière du chanteur avec clarté et sensibilité. Comme quoi on peut entrer au musée, vivant, sans être statufié…

Retour en chansons, en fins souvenirs et en belles photos sur un artiste qui nous accompagne depuis cinq décennies. (© David Séchan/courtesy Philharmonie de Paris)

« Pourquoi une expo ? J’suis pas mort ! » fut la première réaction de Renaud, lorsque son jumeau, David Séchan, lui présenta l’idée d’une rétrospective à la Philharmonie de Paris. « Bah justement ! » lui répondit ce dernier. Photographe ayant pris son frère comme modèle depuis de nombreuses années, David a préféré nous proposer un voyage à travers la carrière du plus illustre des Séchan, Renaud, plutôt qu’une exposition de ses seuls clichés. « L’idée étant de montrer la construction d’un artiste, à travers sa famille mais aussi son époque. Et comme on le découvrira, les événements de Mai 68 sont ici fondateurs », nous précise-t-il.

Dès le début, le visiteur est séduit par les cahiers d’écolier sur lesquels Renaud rédigeait des textes, comme cette ébauche de roman policier, et aussi ces feuilles volantes sur lesquelles il crayonnait dessins et premières chansons. Les archives personnelles ont beau avoir soixante ans, elles sont intactes, la « Mob » – Motobécane AV88 bleue – bien connue des fans illumine la deuxième salle. « Renaud garde tout », soulignent en choeur les deux commissaires de l’expo, David Séchan, donc, et Johanna Copans, grande connaisseuse de son oeuvre. Normalienne, elle a été la première à lui consacrer une thèse.

Grandes étapes

Découpées en plusieurs salles, comme autant de grandes thématiques (Gavroche porte d’Orléans, Du chanteur de rue à « Hexagone », Citoyen du monde, Engagements et illusions…) mises en scène par Gérard Lo Monaco, concepteur des décors des tournées, toutes les étapes du parcours de Renaud se dessinent peu à peu. Une expo somme toute plus didactique qu’interactive (ni karaoké ni salle de relooking en titi parigot…), on ne s’en plaindra pas.

Si l’enfance de Renaud semble une malle sans fond, à travers notamment une passion immodérée pour la bande dessinée – Ptiluc, Frank Margerin, Patrice Killoffer, Jano sont présents -, cette « Putain d’expo ! » montre également l’ouverture progressive du chanteur aux autres. Toujours avec les influences à portée de main : Bob Dylan, Georges Brassens, Bruce Springsteen ou Bernard Dimey… une salle résume la chose.

« Charlie » et Tonton

L’aventure de « Charlie Hebdo » n’est bien évidemment pas oubliée, une histoire ancienne, puisque, en 1992, il contribue au financement de la relance et offrira par la suite de nombreuses chroniques. N’est pas oublié non plus son soutien indéfectible à François Mitterrand : la page « Tonton, laisse pas béton » parue dans « Le Matin », le 7 décembre 1987, est ici présentée. Puis, après quelques clips sur un écran géant, le dernier espace est presque entièrement consacré à la scène. Des années d’aventures et de souvenirs pour ses contemporains : il est vrai que l’homme nous accompagne depuis cinq décennies déjà.

Ne pas oublier qu’à l’étage la suite de l’exposition est consacrée à des projections de concerts, ainsi qu’à des créations de l’illustratrice Laureline Mattiussi. Renaud est rentré au musée, mais cela ne l’empêche d’être bien vivant. Il aura soixante-dix ans en 2022… le temps ne fait rien à l’affaire.

RENAUD, PUTAIN D’EXPO !

MusiQue
Philharmonie de Paris – Musée de la musique, PHILHARMONIEDEPARIS.FR
du 16 octobre 2020 au 2 mai 2021

Christian Eudeline

Source : Les Echos