«Renaud va bien» : David Séchan donne des nouvelles rassurantes de son frère

Le Parisien

Par Propos recueillis par Eric Bureau
Le 24 octobre 2018 à 19h18

David Séchan photographie son frère jumeau depuis leur adolescence. Il publie un livre de ces clichés et en profite pour nous confier que Renaud a repris le travail sur son nouvel album.

Dans le livre de photos* que David Séchan consacre à son frère jumeau Renaud, un portrait en noir et blanc lui tient à cœur. Ils ont 7 ans et posent dans leur maison de la porte d’Orléans à Paris. David enroule un bras protecteur autour de son frère, plus frêle mais aussi plus frondeur. Soixante années ont passé mais leur rapport n’a guère changé.

C’est toujours David, né avec quinze minutes d’avance, d’un second placenta – ils sont en fait jumeaux dizygotes -, qui protège Renaud. Devenu éditeur musical et administrateur à la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), David Séchan nous raconte leur histoire et nous donne des nouvelles rassurantes.

On a lu des choses alarmantes sur votre frère. Comment va-t-il ?

DAVID SÉCHAN. Renaud va bien. Malgré les informations de certains médias, il est en pleine renaissance. A nouveau. Il passe sans cesse du fond du trou au zénith avec une rapidité foudroyante. C’est un artiste très fragile, mais qui a de la ressource.

Est-il toujours en cure de sevrage ?

Non. Il n’est resté que douze jours à l’hôpital à Montpellier en septembre. Les médecins voulaient le garder plus longtemps, mais cet animal n’en fait qu’à sa tête. Il est sorti quand il était sevré. Il en est sorti sobre et depuis, il a une hygiène de vie bien meilleure, il ne boit que de l’eau et beaucoup de Bitter San Pellegrino. Plein de sucres, mais pas d’alcool. Et il travaille sur son disque.

Un disque pour enfants ?

Un disque sur l’enfance. Le projet a changé avec le temps. Son écriture allait plus vers des souvenirs de cours de récréation, d’amitié, assez drôles, assez crus parfois. J’ai lu pas mal de textes. C’est du bon Renaud, il y a toujours la plume du chanteur énervant.

Et les musiques ?

Elles sont signées Renan Luce, Michaël Ohayon (NDLR : son directeur musical et guitariste) et Thierry Geoffroy, un grand ami de Renaud, qui a composé pour Hélène Ségara et Céline Dion. Une grosse dizaine de chansons a été enregistrée à Bruxelles, mais le problème, c’est la voix défaillante. Renaud n’en est pas satisfait et ne veut pas qu’elle soit trafiquée. Cela l’a contraint à se soigner et à se reposer. Il va réenregistrer les voix chez lui (NDLR : à l’Isle-sur-la-Sorgue, dans le Vaucluse).

Quand sortira le disque et sera-t-il suivi d’une tournée ?

J’imagine qu’il sortira l’an prochain. Mais une tournée, je ne fais plus de pronostics. Je n’aurais pas parié un centime sur son retour discographique (NDLR : avec l’album « Renaud » en 2016), encore moins sur son retour sur scène. Pendant sept ans, il avait disparu des radars, passant son temps au fond d’un bistrot. Et il est revenu, a vendu 800 000 albums, fait 120 concerts devant 800 000 spectateurs. Il nous a bluffés encore une fois.

Cette succession de hauts et de bas, c’est l’histoire de sa vie.

Les trente dernières années en tout cas. C’est un phénix, comme il le dit lui-même. Il faut qu’il travaille, sinon c’est la déprime. Il y a une nostalgie qui le gagne, une nostalgie profonde, de l’enfance, de la vieillesse, de ses amis disparus, Coluche, Desproges, Gainsbourg, ses copains de « Charlie Hebdo »… Il reste scotché sur l’enfance, comme en témoignent de nombreuses chansons et son nouvel album.

Comment expliquez-vous son mal-être ?

C’est difficile à dire. Alors que nous sommes issus du même moule, nous avons toujours été différents. A l’école, j’étais prix de camaraderie, lui était déjà taiseux, n’avait pas beaucoup d’amis. Il est tout de pudeur, de retenue, a toujours détesté la célébrité, le show-biz. Sur scène, il se livre à son public mais en dehors, il a beaucoup de mal à dire « Je t’aime » aux gens qu’il aime et qui se mobilisent pour lui, ses enfants, ses ex-femmes, sa mère, ses frères et sœurs, ses amis… Ses hauts et bas sont durs à vivre pour ses proches.

Vous l’avez vu récemment ?

Il y a deux semaines, après son hospitalisation, j’ai passé quelques jours avec lui dans le Sud. Nous nous sommes baladés, au resto, dans un rassemblement de bikeurs, nous avons regardé du foot à la télé. Il regarde beaucoup la télé. Dans les discussions, il était à l’écoute mais parlait très peu. Du coup, quand, à la fin, il m’a dit « Ah bon tu pars déjà ? », j’étais presque surpris. Une démonstration d’affection rare chez lui.

Même avec ses enfants ?

Avec eux aussi, il a une pudeur hallucinante. Lolita est formidable, s’occupe beaucoup de lui et ce n’est pas simple pour elle. Malone aussi. C’est un gamin adorable. Il s’est mis à la guitare, écrit des textes, son père voulait l’inscrire à la Sacem, à 10 ans. Je lui ai dit que c’était un peu jeune (il sourit).

De quel milieu venez-vous ?

Petite bourgeoisie sans argent. Ma mère s’occupait de six enfants. Mes parents n’ont jamais été propriétaires, n’ont jamais eu de voiture neuve. C’est une famille intellectuelle et artiste par mon père, qui était prof, écrivain et traducteur, fils de prof et de poétesse. Prolétaire et engagée par ma mère, dont le père était adjoint communiste à Stains (Seine-Saint-Denis). Tout Renaud est dans ces deux versants. Notre père est mort à 96 ans, et notre mère, 95 ans, est toujours en vie. Cela explique aussi la résistance de mon frère.

* « Dans l’intimité de… Renaud », par David Séchan, éditions Best Of Company, 192 pages, 29,90 euros.

  

Source : Le Parisien