A la veille de ses 50 ans, Romane Serda revient sur son passé dans un livre, «A la vie, à l’amour». Celle qui a partagé la vie du chanteur Renaud et qui lui a donné un fils raconte les joies, les obstacles et les déboires qui ont jalonné sa vie.
Pourquoi écrire un livre autobiographique, «A la vie, à l’amour»?
Dans le regarde des gens, j’ai parfois la sensation d’être née au moment où j’ai rencontré Renaud. Or, non, ce n’est pas le cas! On m’a proposé d’écrire un livre sur ma vie. J’ai finalement accepté, aussi pour laisser une trace à mon fils, Malone. J’ai eu envie de raconter les rencontres et les événements qui ont marqué ma vie. Et puis, je me suis rendue compte qu’en regardant le passé, on peut mieux appréhender le futur. J’ai l’impression de faire le point pour mieux repartir. Ce livre a peut-être aussi une vertu thérapeutique. Il m’a permis notamment de discuter davantage avec ma mère.
Justement, dans le livre, vous racontez votre enfance en solitaire, dans une ambiance baba cool. Votre jeunesse a-t-elle été heureuse malgré tout?
Enfant, je n’ai pas été très encadrée, je n’étais pas au centre de l’attention de ma mère qui refaisait sa vie à ce moment-là. Avec le recul, j’ai compris qu’elle a fait comme elle a pu. Et puis, il faut se rappeler qu’à l’époque, les enfants étaient moins au centre des préoccupations. Mais avec le recul, je réalise que j’ai eu la chance d’avoir beaucoup de liberté. Cela m’a construite, ça m’a donnée de la force. Petite, je faisais tout pour me faire discrète, j’étais effacée. Je me suis révélée plus tard, au collège. J’ai commencé à faire des bêtises pour me faire remarquer…
«J’avais peu confiance en moi»
Jeune adulte, votre parcours sentimental est chaotique. Ces histoires vous ont-elles abîmée?
J’avais peu confiance en moi. Je faisais tout pour les hommes, pour être aimée, au risque de m’oublier et de me perdre. C’est malheureux à dire, mais j’étais soumise. Je me pliais à tout pour plaire aux autres. J’étais dépendante de l’amour, il fallait que je sois aimée à tout prix. Je suis tombée sur un homme qui m’a fait mettre ma carrière entre parenthèses. C’était un escroc, j’ai fini en garde à vue, j’ai eu des soucis… A l’époque, je l’ai suivi à Londres. Je devais rester 15 jours, j’y suis restée six ans.
Vous rencontrez alors un Anglais avec qui vous partagez le goût de la musique.
Oui, on partageait beaucoup de choses, notamment la musique. Avant de le rencontrer, j’étais comédienne. En France, j’avais notamment joué dans le sitcom «L’Annexe». Mais en Angleterre, c’était difficile de percer dans la comédie, à cause de mon accent. J’en ai profité pour me lancer dans la musique. Je m’y suis mise sérieusement à ce moment-là. J’ai enregistré quelques titres.
Comment la parenthèse londonienne s’est-elle refermée en 2002?
Je suis tombée enceinte. Je suis alors rentrée à Paris pour avorter. Et finalement j’y suis restée. J’ai réalisé que je n’avais rien à faire avec quelqu’un avec qui je ne pouvais pas fonder une famille. J’avais l’âge d’envisager de faire un enfant, mais je ne voulais pas faire un enfant toute seule, j’ai avorté à contre-coeur. D’où la chanson «Pleure pas», dont Renaud a écrit les paroles et moi la musique. Je suis rentrée en France à 30 ans, c’était un mal pour un bien.
Qu’avez-vous fait à votre retour à Paris?
J’ai travaillé à Radio France. J’étais assistante sur différentes émissions. Avec le soutien d’un studio, je commençais aussi à travailler sur des chansons, j’avais déjà un début d’album. Un soir, j’ai rencontré Renaud dans un restaurant. Il a écouté mes titres et, quelques jours plus tard, il m’a téléphonée. On a commencé une relation chaotique. On se voyait de temps en temps, mais j’avais l’impression de l’ennuyer. Il parlait peu et je repartais à chaque fois avec une sensation de malaise. Je tombais malgré tout amoureuse. Au fil du temps, on ne s’est plus lâchés.
Vous écrivez «J’ai trouvé mon âme soeur, sensible, esquinté, increvable». Avez-vous le sentiment de trouver votre alter ego?
Oui, on était pareils, on était fusionnels, on avait les mêmes blessures. On se comprenait!
…Sauf qu’il y avait l’alcool. Renaud comptait-t-il beaucoup sur vous pour s’en défaire?
Oui, c’était difficile de me donner ce rôle-là. Je débarquais dans sa vie et je devais faire le flic. Quand l’envie de boire était trop forte, il était remonté contre moi et il me parlait mal. Il pouvait rester sobre pendant quelques mois. Et par moments, il s’autorisait à boire seulement une fois par semaine, mais ça ne fonctionnait pas.
Quelques années plus tard, vous vous êtes mariés et vous avez donné naissance à Malone, votre fils qui a aujourd’hui 14 ans. Renaud allait-il mieux à ce moment-là?
J’étais inquiète. Avant de faire un enfant avec lui, je voulais qu’il soit sûr et qu’il ne me fasse pas vivre un enfer avec l’alcool. Il m’écrivait des lettres, il me faisait des promesses, il y croyait. Moi j’étais naïve, je ne savais pas ce qu’était l’alcool, je ne savais pas qu’il était si dur de s’en sortir. On s’aimait tellement, on était tellement complices que je ne me voyais pas avec un autre homme. Alors j’ai sauté le pas, même si j’avais peur.
Quel genre de père était-il?
Quand Malone était petit, on vivait à Londres. Renaud le portait sur ses épaules, il lui faisait des massages… Il était en extase devant son fils, même s’il n’était pas toujours doué pour le montrer. On avait alors une vie intense, on ne s’ennuyait pas, mais globalement Renaud était un bon père pour Malone.
«Renaud avait ses démons à gérer»
La paternité a-t-elle changé Renaud?
Il était très demandeur, il était très autocentré, comme tous les gens qui ont un problème. Or j’avais un enfant dont je devais m’occuper. Renaud avait ses démons à gérer, mais je ne pouvais plus lui consacrer autant de temps qu’avant et passer des nuits à discuter. Moi j’avais besoin de dormir la nuit et d’être disponible pour mon fils. C’était difficile.
Comment la séparation s’est-elle imposée, quelques années plus tard?
Pendant un an, je lui ai dit que je ne pouvais pas continuer comme ça, mais il ne voulait pas l’entendre. Il passait son temps dehors et il rentrait à la maison dans un état pas possible. J’ai arrêté de lui dire de ne pas boire, j’ai baissé les bras, j’ai arrêté de vivre ses échecs comme si c’était les miens. Je n’étais pas responsable de ses choix, de sa santé, de sa vie… Je lui ai demandé de se responsabiliser et de se prendre en main. J’avais alors Malone dont je devais m’occuper et qui avait aussi besoin de son père.
Vos relations se sont-elles apaisées depuis que vous êtes séparés?
Depuis notre divorce en 2011, je n’ai plus d’attentes. Je n’attends plus rien de lui. Je n’attends pas qu’il rentre à telle heure pour qu’on fasse quelque chose ensemble. Quand on se contacte, c’est que de l’amour amical, fraternel. Pour Malone, il fait ce qu’il peut, ils s’appellent régulièrement, mais ils se voient peu, car Renaud vit maintenant dans le sud de la France. Quand il vient à Paris, on se voit davantage.
Où en êtes-vous aujourd’hui, une dizaine d’années plus tard?
Je travaille sur des projets de musique, je prépare mon cinquième album et j’ai aussi des projets en tant que comédienne. Je suis heureuse en couple. Après Renaud, j’ai eu du mal à me reconstruire et à retomber amoureuse. Et sinon, je me consacre à mon fils. J’essaie de me rendre le plus disponible possible pour lui… C’est l’essentiel!
Source : blue News