Bourg-en-Bresse
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Posté le 30 août 2023 par La Rédaction
Il faut vraiment aimer Renaud, ronchonneront les mauvaises langues, pour aller le voir encore s’érailler les cordes vocales. Mais quand on fait partie de ce grain-là, biberonné au sirop de la rue, aux odes engagées et comptines écorchées du poète gavroche, l’amour n’attend pas le nombre des octaves. Alors quand l’opportunité d’un concert intimiste au Parc des oiseaux se présente, on coche la date. Simplement. Le Renard a pris ses quartiers dans la Dombes durant deux jours, lundi 28 et mardi 29 août. Et l’on y était, alors on vous raconte : la nostalgie d’un moment suspendu au fil d’un étang où même les grenouilles se sont laissé embarquer.
Quand il s’avance, l’ami Renaud, pour pousser les premières notes de sa Pêche à la ligne, la voix s’échauffe timidement. Il bouffe quelques mots. Qu’importe, on la connaît par cœur. L’énergie est belle, il a l’air heureux. Sa nouvelle « gonzesse », Cerise, se mêle à la foule, avec son ciré et son briquet. Elle sait que son amoureux carbure au diesel. Il a arrêté la clope il y a six mois, l’alcool il y a trois ans, annonce-t-il fièrement. Bon, ça fait vingt piges qu’il nous la fait, celle-là, mais cette fois on y croit. On le laisse réciter ses gammes, patiemment, on tape des mains pour l’accompagner, et on chante à sa place quand il tend la main vers nous. Il est là, toujours debout. S’il a besoin de béquilles, il en a mille dans les gradins. Il récite ses classiques, accompagné par un orchestre magistral, envoûtant, portant ses musiques iconiques haut dans le ciel aindinois.
Renaud a gardé son brin de malice. Il s’adresse à ses fans, d’abord invités à ranger leur téléphone par un court message enregistré, pour leur dire que « c’est des conneries ». Une foule de petites lumières se met alors en mouvement pour immortaliser ses chansonnettes. De Manhattan-Kaboul à Mistral gagnant, en passant par d’autres moins connues, mais qui gagneraient à l’être, comme Son bleu, cet hommage touchant à la classe ouvrière et au bleu de travail. Il a tenu deux heures, il est revenu pour trois chansons de reprise, il a fait le boulot, proprement. Rien que pour ça, quand on aime le bonhomme et surtout sa prose, ça valait le coup. Sur le chemin du retour, alors que le traditionnel bouchon de sortie de parking s’évacuait sereinement dans la fraîcheur d’une fin d’été, ma fille m’a demandé que je lui chante a capella Petite, un morceau qui ne figurait pas dans la playlist du soir. Elle dresse le portrait d’une groupie du chanteur, une ado rebelle qui porte le keffieh et qui, comme lui, crève à petit feu en voyant le monde s’entretuer. Ma gamine a fini par s’endormir, le nez collé à la vitre. Elle pourra dire, à son entrée en 6e, qu’elle a vu Renaud et son père chanter.
Source : Magville