Par MIGLIORINI Robert, le 4/1/2003 à 12h00
La liste ressemble à l’affiche d’un film (réalisé par Claude Sautet) devenu, depuis sa sortie en 1974, un classique du portrait de groupe. Ils sont aujourd’hui 14 chanteurs et un comédien (Michel Piccoli) à marquer à leur façon les 80 ans de Serge Reggiani : le Manda de Casque d’or. A l’heure où fleurissent avec succès les retours sur cette forme de chanson française, un temps menacée d’oubli, plusieurs générations d’artistes revisitent donc avec force les années Reggiani. La réussite n’est pas totale mais l’essentiel est là : des chansons qui touchent toujours.
Acteur déjà célèbre lors de son entrée en chansons, à plus de 40 ans, Serge Reggiani a su depuis 1963 se constituer un répertoire sur mesure, avec notamment des auteurs et compositeurs comme Dabadie, Michel Legrand, Claude Lemesle, Vidalie. Georges Moustaki, qui est l’un d’eux, rappelle dans son autobiographie que Reggiani imposa ses chansons « envers et contre tous les fabricants d’idoles qui n’en revenaient pas d’être battus sur leur propre terrain ». Un tel patrimoine ne peut donc laisser indifférent ceux pour qui la chanson rime avec émotion, bonheur, passion et liberté.
On comprend que les quinze n’aient eu que l’embarras du choix pour rendre un hommage sans affectation à leur aîné. Ils redonnent voix à ce Barbier de Belleville qui désormais chantonne plus qu’il ne chante. « Enfants soyez meilleurs que nous », lançait lui-même dans son dernier album Serge Reggiani. Présent et passé se conjuguent sans peine. Renaud, rescapé de tant de chagrins, est au diapason d’un déchirant Le petit garçon. L’éclectique Marc Lavoine convainc dans Ma solitude. Maxime Le Forestier, auteur en son temps de Reggiani, choisit la simplicité avec Votre fille a 20 ans, à la guitare. Quant à la généreuse Juliette, elle donne le frisson dans Les loups sont entrés dans Paris : une dénonciation des racismes et totalitarismes, toujours menaçants. La nouvelle génération choisit L’Italien, avec le styliste Bénabar. Une fanfare de cuivres accompagne l’évocation du retour d’un saltimbanque à la maison, après bien des voyages. Enrico Macias, inattendu en ces contrées, ne manque pas Ma liberté, passeport des sans-frontières de l’âme et du coeur. La dynastie d’artistes que sont les Reggiani est, bien sûr, représentée par Nicolas avec Bonne Figure.
Son grand-père Serge est présent avec un Temps qui reste pathétique et sincère à la fois. L’artiste donne rendez-vous à son public fidèle pour des concerts que l’on peut considérer comme des adieux parisiens, au Palais des Congrès les 14 et 15 mars prochain. Un véritable défi.
Robert MIGLIORINI
Autour de Serge Reggiani, un album Tréma. Les productions Jacques Canetti (Polydor) ont réuni 40 titres de Reggiani dans un double album collection, avec ses principaux succès dont les chansons de Boris Vian et de Jacques Prévert.
Source : La Croix