Soldat Louis chante les bars et les filles à matelots

Le nouvelliste

31 décembre 1988

Les disques

André Gaudreault

L’Aristide Bruant moderne, le chanteur Renaud, a fait des petits. Il s’agit en fait de son groupe accompagnateur qui vient d’enregistrer un premier microsillon «Première bordée» sous le nom de «Soldat Louis». (Sur étiquette Gamma. No GS 270).

Il s’agirait de six Bretons, ai-je pu lire quelque part. Mais ce sont sûrement des Bretons de Paris. D’abord à cause de l’argot, qui n’est pas toujours celui de la mer. Mais les chansons, elles, ce sont bien des chansons de marins, où le rhum coule à flots et où les filles et la musique ne manquent pas. D’ailleurs le premier succès du groupe au Québec s’intitule «Du rhum, des femmes».

En même temps que l’on découvrira un groupe extrêmement vivant, plein d’humour et de joie de vivre, on apprendra à connaître un nouveau parolier, Gary Wickham, à l’imagination débordante et au verbe cru. C’est du Renaud de mer. Plutôt que de chanter les fleurs de
pavé, Soldat Louis chante les bars et les filles à matelots.

Non seulement le groupe se distingue par ses textes, mais aussi par le son. En effet, les instruments sont loin d’être tous conventionnels. À côté de l’accordéon et des guitares, on trouve par exemple le biniou (ou quelque chose d’approchant). Son bizarre et agréable,
donc. Et chansons terriblement vivantes, parfois légèrement grivoises, souvent pleine d’humour et surtout très près de la vraie vie.

Cela donne un disque rafraîchissant comme nous n’en avons pas entendu depuis longtemps. Depuis Renaud, à vrai dire qui, lui, prenait la relève de Bruant avec des décennies de décalage. Mais cette chanson, si typiquement française, ne peut pas mourir.

Lightfoot

Les rockers ne seront pas d’accord, mais j’ai toujours préféré la chanson «Me and Bobby McGee» interprétée par Gordon Lightfoot plutôt que par Janis Joplin.

C’est que j’aime avant tout la voix de Lightfoot, surtout pour la nostalgie qu’elle charrie. Et puis Gordon écrit de fort belles choses. Des chansons qui parlent de la vie des gens ordinaires. C’est aussi un parolier remarquable, qui raconte des histoires souvent très longues, mais toujours avec les mots qui conviennent et la rime par surcroît.

Gordon Lightfoot est un auteur. compositeur et un interprète dont le succès s’est étendu aux États-Unis et ce n’est pas sans raison. C’était d’abord, il faut le dire, la plus grande star solo du Canada anglais. S’il fait un peu country comme interprète, ses musiques, cependant, vont dans tous les sens, et le rythm and blues de même que le funk ne manquent pas, deux genres qui conviennent parfaitement à la voix nostalgique de Lightfoot.

On ne connaît pas au Québec tous les succès de Gordon Lightfoot, mais il en a fait suffisamment pour mettre sur le marché un deuxième microsillon intitulé «Gord’s Gold, Volume II» (Sur étiquette Warner Brothers. No 92 57841). Et ce qui est intéressant, c’est que sur les 16 chansons de l’album, seulement deux ne sont pas de nouvelles interprétations. Mais Lightfoot est toujours aussi talentueux aujourd’hui qu’hier.

Bottine souriante

La Bottine souriante, ce groupe folklorique de la région de Joliette persiste à nous offrir régulièrement aux temps des fêtes un nouvel album. Voici donc La Bottine avec «Je voudrais changer d’chapeau», son sixième album. (Sur étiquette Bouleau noir. No BN 2036).

Si j’ai toujours trouvé ces musiciens plutôt faibles dans leurs disques antérieurs, cette fois-ci ils me semblent bien maladroits d’avoir voulu moderniser leur son en y ajoutant un quatuor à cordes, un trombone et une trompette. Voilà des instruments qui n’ont rien à voir avec les traditionnels accordéons et violons du temps passé.

Par surcroît, il y a beaucoup trop de chansons à répondre dans leur répertoire par rapport à la musique instrumentale. Et surtout, des chansons que l’on ne connaît ni d’Ève ni d’Adam. Par ailleurs, la pochette est une horreur de même que les textes explicatifs à l’intérieur.

Voici un disque à oublier au plus coupant.

  

Source : Le nouvelliste