Sur le bateau de Renaud

Salut !

N° 273, 12 au 26 mars 1986

Un mois de triomphe pour Renaud au Zénith. Salut ! était au premier rang.

Le Zénith, c’est un peu à l’autre bout du monde. Dison, au moins, au bout de Paris. Trois millions de stations de métro pour arriver jusqu’à « Porte de Pantin ». Vous me direz que je ne suis pas obligé de prendre le métro, qu’un reporter de Salut ! ne devrait se déplacer qu’en Jaguar type E, la crinière au vent. Mais moi j’aime bien le trip parcours du combattant-rock… Arrivé aux abords du périph, il reste encore environ 3 000 kilomètres de marche à pied à travers un parking battu par les vents. Sur le côté, des baraques à frites se battent pour faire découvrir aux retardataires les plaisirs de la graisse solidifiée. Retardataire ? J’ai l’impression en effet de l’être. Soit je suis extrêmement en avance pour le gig de demain, soit Renaud a eu le mauvais goût de commencer sans moi ! Pourtant, pas un bruit ne sort de l’aéroport désaffecté (n’est-ce pas cette ancienne fonction que symbolise le zingue rouge surplombant le lieu ! ?). Il reste trois cerbères et demi à l’entrée, sirotant une petite bière. Dans le hall où se vendent les boissons fraîches et les T-shirts à l’effigie de la vedette (Renaud préfère ce mot à celui de star), j’ai un avant-goût de l’ambiance. Vacarme assourdissant. Les milliers de bobs fans sur les gradins tapant du pied comme des brutes. Ces dits gradins étant situés au-dessus du hall, lequel hall était vide (à part moi !), imaginez la caisse de résonnance ! Des milliers de pieds tambourinant dans mes petites oreilles. L’enfer ! J’adore ça. C’est toujours signe que l’ambiance est chaude. Et le concert itou. À coup de coudes, je me faufile dans la foule pour trouver un point d’observation stratégique. En l’occurrence face au chanteur, assez près pour le voir grimacer. Autre condition indispensable : être placé juste derrière une bande de nains de manière à ne pas avoir une touffe de cheveux hirsutes qui parasitent votre vision. J’avise un voisin, l’interromps dans sa chanson (il chante tellement fort que parfois il me semble que Renaud fait du playback sur scène) et lui demande depuis combien de temps le spectacle a commencé. Il me regarde comme si j’avais l’air d’un martien. Remis de ses émotions, il m’apprend, tout de même, que je n’ai finalement loupé qu’une seule chanson. Autour de moi, ils sont sept mille à danser, chanter, vociférer, applaudir. Des gens de toutes sortes. Des rockers, des BC-BG, des vieux, des jeunes, des (…), de tout. (…)

Renaud et son équipage jette l’ancre au Zénith. Ambiance portuaire sur scène et marée humaine dans la salle. Renaud : bête de scène. En synchro parfaite avec son orchestre.

  

Source : Salut !