Toujours aussi Renaud, malgré tout

Le Journal du Jura

NEUCHÂTEL | Patinoire pleine à craquer pour accueillir la star tourmentée

Le 15 décembre 2003
Par Alexandre Caldara

Le chanteur rebelle et engagé a trouvé un nouveau public, mais ses cordes vocales souffrent sérieusement. Le sentiment est mitigé entre souvenirs et réalité.

On est un peu surpris par le public composé de beaucoup de jeunes gens plus vraiment rebelles. Plutôt looké pour sortir en boîte que pour écouter les chansonnettes militantes de Renaud Séchan, un verre de pastis dans une main, une pétition dans l’autre. La Patinoire du Littoral, à Neuchâtel, est pleine à craquer ce samedi soir, le public frappe des mains. Ce public plus formaté par la chaîne de télévision américaine MTV que par la fête de l’Huma tranche un peu avec le décor toujours aussi bal populaire de la scène. Un arbre, l’hôtel de la nuit, le bistrot de Renard et les bons vieux complices musiciens emmenés par le toujours fidèle Jean-Pierre «Titi» Bucolo.

Clope et perfecto

Un air d’accordéon et l’on pourra revivre les sensations du bon vieux temps, ou plutôt avoir les sensations de les revivre, car la carte postale a tout de même subi les outrages de la vie et des verres d’alcool renversés. Le papier à musique a jauni, les rides apparaissent et le vague à l’âme n’a pas vraiment quitté notre sombre héros. Ses cordes vocales, elles, semblent sérieusement abîmées. Pourtant malgré tous les avatars de l’existence, Renaud reste notre ami, notre frérot, notre pote, celui qui a colorié notre adolescence de ses refrains engagés et de ses ritournelles amoureuses. Il porte toujours le perfecto et va bientôt allumer une clope. La dégaine reste la même. On a envie alors de se boucher les oreilles et de l’entendre comme au bon vieux temps. Parce qu’on l’aime ce mec-là et que c’est pas parce qu’il n’est pas au mieux de sa forme que l’on va arrêter de l’aimer.

Vieilles rengaines

Il commence par le tube de sa résurrection «Mister Renard». Et enchaîne bien vite par une des tirades dont il a le secret sur la longueur de ses spectacles et sur le dilemme de ses dernières années le combat entre Renaud et Renard. «J’aime bien vous énerver», conclut-il avec son esprit canaille. Il poursuit avec une petite chanson manifeste pour Noël Gaudin et contre Bernard-Henri Lévy «L’entarté». Et puis arriveront ces vieilles rengaines qui nous font tous rêver, Renaud sait que certains les attendent: «Vous êtes comme mon guitariste Titi, vous préférez les vieilles.» Les sorties sont excellentes mais sentent un peu le réchauffé, en mai à l’Arena de Genève cela y ressemblait furieusement.

Sur «Germaine», le chanteur retrouve enfin sa gouaille d’antan, on prend du plaisir et la salle se met à valser. L’exercice est beaucoup plus laborieux sur «Miss Maggie» et «Mistral gagnant». Le tempo prend de vilaines torgnoles dans la tronche et les paroles restent bloquées dans une gorge un peu trop engorgée par le tabac et la vie qui passe. Une vie qui revit si l’on en croit Renaud grâce à Romane son nouvel amour qu’il évoquera plusieurs fois sur scène comme pour repousser les vilains fantômes. Pour finir il enchaîne avec «Manu», «Mon bistrot préféré», «Dès que le vent soufflera» et «Mon HLM», comme pour laisser à tout le monde un coin de plaisir dans la tête.

Alexandre Caldara

 

Source : Le HLM des Fans de Renaud