Un été avec Renaud (5) : Benoît Dorémus, le disciple et l’ami

Sud Ouest

C’est déjà ça
Le blog chanson de Yannick Delneste et Philippe Ménard

15/09/2014

C’est l’un de ses descendants les plus éclatants, évidents, épatants. Sans singer le Renard, Benoît « Bénito » Dorémus a la plume nourrie à la même émotion-dérision craquante. A l’aube d’un nouvel album, le jeune chanteur raconte la rencontre avec son mentor qui va produire en 2005 son premier disque, et devenir son pote.

C’est l’un des titres les plus réussis de l’album-hommage « La bande à Renaud » : « Je suis une bande de jeunes » reprise façon quasi-mariachi par Alexis HK, Renan Luce et Benoît Dorémus. « Il nous aime beaucoup, est venu nous voir quand on a joué tous les trois au Café de la danse lors de notre tournée Seuls à trois », se souvient ce dernier. Si pour Alexis la filiation et admiration de Brassens est un point commun, si pour Renan Luce l’amour de la langue… et du gendre s’imposent, le lien entre Dorémus et Renaud remonte au mois de novembre 2005. Lieu : la Closerie des lilas, dans le XIVe arrondissement. Une brasserie cossue où Renaud a depuis quelques années ses habitudes… alambiquées et gambergeuses d’artiste à l’inspiration chaotique.

Le jeune auteur-compositeur a sous le bras « Pas en parler », son  disque auto-produit, mais aussi une guitare Martin des années 20. Le chanteur suisse Sarclo lui a confié quelques jours auparavant pour son ami Renaud qui veut l’offrir à Romane Serda, son épouse. L’occasion pour l’Helvète de présenter à Renaud ce rejeton dont il goûte la verve. « J’ai toujours écouté Renaud », explique Benoît. « Par mes grands frères d’abord. « Morgane de toi » me remuait. Il m’a accompagné pendant l’adolescence. J’ai immédiatement adoré son ton, son humour et ses colères. »

A cette époque, Renaud va bien. Trois ans plus tôt, il a effectué son grand retour avec « Boucan d’enfer », succès public énorme et accueil chaleureux du métier ont remis le gars en selle : il s’investit pour Ingrid Bétancourt, produit sa femme Romane, écoute les jeunes artistes.  Et le voilà qui se présente, pas trop fiérot, dans cette Closerie-repaire. « Il a lu TOUTES les paroles des chansons de mon autoproduit, sans un mot, feuilletant les pages du livret », se souvient Dorémus. « Puis il m’a dit des mots dithyrambiques, j’en étais gêné (rires). Il était sincère sans jamais oublier d’être taquin, en me disant que les musiques devaient être à chier! » Même pas.

Le Renard est conquis par le style du jeunot, épatant héritier sans copier, notamment via la dimension hip-hop inspirée de son idole Eminem. Il décide de produire le vrai premier album de Dorémus. « Jeunesse se passe » sort en 2007. « Il a été très attentif, au soutien », poursuit Benoît. « Il était dans une bonne période et c’était un bonheur de travailler avec lui. » Entre-temps, un événement: pour la troisième fois seulement, Renaud va chanter un titre dont il n’a pas écrit le texte. Après « La chanson du loubard » écrit par Muriel Huster (1) et « Soleil immonde » signé Michel Colucci, dit Coluche (2), il interprète « Rien à te mettre » sur l’album « Rouge sang » qu’il sort en octobre 2006. On peut comprendre sans difficulté le coup de foudre qu’a eu Renaud pour ce petit bijou de déclaration d’amour textile. Les deux gars l’interpréteront ensemble à « Taratata »:

Déjà présent sur l’autoproduit, « Pas en parler », la chanson sera aussi et logiquement sur « Jeunesse se passe » de Dorémus. Moins en forme, Renaud ne produira pas son second disque « 2020 ». « Après une relation très intime, artistique et humaine entre 2008 et 2012, on est restés des amis proches », explique le jeune auteur-compositeur. Une amitié de neuf ans maintenant! » Quand à l’automne 2011, les trois loustics Alexis, Renan et Benoît taillent la route en partageant leurs répertoires, ils reprennent déjà « Je suis une bande de jeunes ». La chanson s’impose sur « La bande à Renaud ».

Benoît Dorémus prépare son troisième album, dont les fidèles ont pu choper quelques titres au fil des concerts: « Déjà ma chère Laura », « La femme de ma vie » ou encore le superbe « Brassens en pleine poire »… que n’aurait pas renié un certain Renaud. « Avant de l’espérer sur un nouveau disque, j’espère d’abord que mon ami va aller mieux », dit Benoît.

Yannick Delneste

(1) Sur l’album « Laisse béton » en 1977

(2) Sur l’album « Le retour de Gérard Lambert » en 1983

 

Source : Sud Ouest