Un formidable personnage que ce Renaud!

Le Canada Français

Saint-Jean-sur-le Richelieu, Québec

Le

C’est un rendez-vous déstabilisant que Renaud a donné à ses fans, samedi soir dernier, au Cabaret-théâtre du Vieux-Saint-Jean. Oui, il chante faux, il a pris du poids et il n’est pas au meilleur de sa forme, mais il a toujours la même tignasse blonde et sa gueule faussement angélique de gamin qui cache des mauvais coups plein ses poches. Ce spectacle, il fallait le voir comme une rencontre avec un formidable personnage pour être en mesure de l’apprécier.

 

Écorché par la critique montréalaise la semaine dernière, à la suite d’une prestation où il s’est surtout fait remarquer pour son état d’ivresse, Renaud a réitéré d’emblée les excuses qu’il avait servies à son public déçu au lendemain de sa première, après avoir entonné un Woody Brouillard… différent.

«Merci d’être venus malgré les critiques» a-t-il lancé, mi-figue mi-raisin, ne réussissant pas à nous faire croire qu’il s’attendait vraiment à jouer dans une salle déserte.

Ce mea culpa n’était pas nécessaire: mauvaises critiques ou pas, les fans de Renaud seraient venus quand même et le Français l’a vite compris. «C’est vrai que j’ai pas bien chanté l’autre soir, mais j’ai jamais bien chanté et c’est pas aujourd’hui que je vais commencer!» Et voilà, la glace était brisée, même si elle était somme toute bien mince. Tout au plus quelques moments d’inconfort qui s’estompent lorsqu’on a compris que c’est sans prétention que Renaud est venu nous pousser les chansons qui ont fait sa renommée.

Bien que cette tournée, Une guitare, un piano… et Renaud, s’inscrive dans la promotion de la dernière compilation de la star, L’absolutely meilleur of Renaud, on a peine à reconnaître ses anciens succès. C’est que la seule corde vocale qui lui reste est devenue une ficelle encrassée de nicotine, nous avoue un Renaud presque penaud pour justifier la voix traînante qu’il prend pour terminer tous ses vers.

On aurait envie de lui répondre que ça ne fait rien, mais c’est parfois un peu triste. Pour un En cloque et une Miss Maggie assez bien envoyés, on aurait parfois envie d’entendre La pêche à la ligne et La mère à Titi d’antan. Jean-Pierre Bucolo et Alain Lanty, respectivement guitariste et pianiste de Renaud, nous réconcilient toutefois avec le spectacle lorsque la voix du chanteur s’élève en frôlant les limites de l’insupportable.

Renaud, après 26 ans de carrière, est toujours aussi heureux de retrouver ses potes Québécois. Il entrecoupe ses chansons de longs monologues, tâte le pouls des spectateurs, qui l’applaudissent à tout rompre. «Allez Renaud!», scandent-ils avec vigueur. En plus de savoir manier le verbe comme pas un, il est généreux le petit Renaud: une prestation de deux heures et demie sans entracte et ses fans lui en redemandent encore, inlassables.

La complicité se tisse rapidement entre la foule et son idole, en panne d’écriture à cause de sa peine d’amour. Renaud donnera quand même un aperçu de son prochain album, dont la sortie n’est pas encore fixée, avec deux nouvelles compositions prometteuses, Boucan d’enfer et Elle a vu le loup.

«Aucune statue ne sera assez grande pour dépasser la cime du moindre peuplier», fredonnait Renaud dans Fatigué. Aucun reproche ne sera assez fort, pour éclipser la place que s’est taillée Renaud. Et ce n’est ni une peine d’amour, ni quelques critiques qui le laisseront sans voix. «Tant qu’il y aura un gamin sur cette Terre pour écouter mes chansonnettes, je chanterai jusqu’à ma mort», réplique-t-il.

  

Source : HLM des Fans de Renaud