Mistral gagnant (paroles)

Mistral gagnant est le septième album studio de Renaud sorti en décembre 1985, sur lequel figurent notamment la chanson éponyme qui est l’une de ses plus connues, et le titre Miss Maggie, qui brocarde Margaret Thatcher. Ce dernier 45 tours connaît un grand succès et est aussi l’objet d’un mini-scandale outre-manche. Le titre se classe plusieurs semaines au Top 50 en mars 1986.

Le 33 tours connaît un énorme succès courant 1986 et se vend à plus de 1 300 000 exemplaires. L’album est dédié « aux petits garçons qui ont les mains sur les hanches », référence à Frédéric Dard et son roman Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches ?, tandis que la chanson P’tite conne est dédiée à Pascale Ogier, morte d’une crise cardiaque à 25 ans, l’année précédant la sortie de l’album.

Voici les pochettes des 45 tours extraits de l’album :


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Voici plusieurs articles sur ce septième album studio de Renaud :

Et voici les paroles de toutes les chansons de l’album :

1. Miss Maggie
    (Paroles de Renaud Séchan, musique de Renaud Séchan et Jean-Pierre Bucolo)

Femmes du monde ou bien putains
Qui, bien souvent, êtes les mêmes
Femmes normales, stars ou boudins
Femelles en tout genre, je vous aime

Même à la dernière des connes
Je veux dédier ces quelques vers
Issus de mon dégoût des hommes
Et de leur morale guerrière

Car aucune femme sur la planète
N’s’ra jamais plus con que son frère
Ni plus fière ni plus malhonnête
A part, peut-être, Madame Thatcher

Femme je t’aime parce que
Lorsque le sport devient la guerre
Y’a pas de gonzesses, ou si peu
Dans les hordes des supporters

Ces fanatiques fous furieux
Abreuvés de haine et de bière
Déifiant les crétins en bleu
Insultant les salauds en vert

Y’a pas de gonzesse hooligan
Imbéciles et meurtrière
Y’en a pas, même en Grande-Bretagne
A part, bien sûr, Madame Thatcher

Femme je t’aime parce que
Une bagnole entre les pognes
Tu n’deviens pas aussi con que
Ces pauvres tarés qui se cognent

Pour un phare un peu amoché
Ou pour un doigt tendu bien haut
Y’en a qui vont jusqu’à flinguer
Pour sauver leur autoradio

Le bras d’honneur de ces cons-là
Aucune femme n’est assez vulgaire
Pour l’employer à tour de bras
A part, peut-être, Madame Thatcher

Femme je t’aime parce que
Tu vas pas mourir à la guerre
Parce’ que la vue d’une arme à feu
Fait pas frissonner tes ovaires

Parc’que dans les rangs des chasseurs
Qui dégomment la tourterelle
Et occasionnellement les beurs
J’ai jamais vu une femelle

Pas une femme n’est assez minable
Pour astiquer un revolver
Et se sentir invulnérable
A part, bien sûr, Madame Thatcher

C’est pas d’un cerveau féminin
Qu’est sortie la bombe atomique
Et pas une femme n’a sur les mains
Le sang des Indiens d’Amérique

Palestiniens et Arméniens
Témoignent du fond de leurs tombeaux
Qu’un génocide c’est masculin
Comme un SS, un torero

Dans cette putain d’humanité
Les assassins sont tous des frères
Pas une femme pour rivaliser
A part, peut-être, Madame Thatcher

Femme je t’aime, surtout, enfin
Pour ta faiblesse et pour tes yeux
Quand la force de l’homme ne tient
Que dans son flingue ou dans sa queue

Et quand viendra l’heure dernière
L’enfer s’ra peuplé de crétins
Jouant au foot ou à la guerre
A celui qui pisse le plus loin

Moi je me changerai en chien
Si je peux rester la Terre
Et comme réverbère quotidien
Je m’offrirai Madame Thatcher

2. La Pêche à la ligne
    (Paroles de Renaud Séchan, musique de Renaud Séchan et Jean-Pierre Bucolo)

C’est à peine l’aurore
et je tombe du plume
Mon amour dort encore
du sommeil de l’enclume

Je la laisse à ses rêves
où je n’suis sûr’ment pas
Marlon Brando l’enlève
Qu’est-ce que je foutrais là ?

Sur un cheval sauvage
ils s’en vont, ridicules
Dehors y’a un orage
ils sont mouillés c’est nul

Moi j’affûtes mes gaules
pour partir à la pêche
Musette sur l’épaule
saucisson, bière fraîche

Quand le soleil arrive
mon amour se réveille
Le cœur à la dérive
les yeux pleins de sommeil

Téléphone à sa mère
qu’est sa meilleure amie
Paroles éphémères
et tous petits soucis

J’aimerais bien entendre
ce qu’elle dit de moi
C’est sûrement très tendre
enfin bon, j’entends pas

Moi je plante mon ham’çon
tout en haut d’une branche
Je tire sur le nylon
me ruine une phalange

Le jour avance un peu
mon amour se maquille
Un œil et puis les deux
c’est futile mais ça brille

Qui veut-elle séduire ?
Je suis même pas là
Je me tue à lui dire
qu’elle est mieux sans tout ça

Que ses yeux sont plus clairs
quand ils sont dans ma poche
et que vouloir trop plaire
C’est le plaisir des moches

Moi je sors une truite
d’au moins cent vingt kilos
J’ai pitié, trop petite
je la rejette à l’eau

Il est midi passé
je reviens les mains vides
Trop de vent, pas assez
l’eau était trop humide

‘lors je rentre chez moi
triste comme un menhir
Mais personne n’est là
pour m’entendre mentir

Mon amour est parti
mais parti pour toujours
J’ai perdu mon amour
et j’ai perdu ma vie

J’emmènerai dimanche
si je peux la gamine
s’emmêler dans les branches
à la pêche à la ligne

J’emmènerai dimanche
si je veux la gamine
s’emmêler dans les branches
à la pêche à la ligne

3. Si t’es mon pote
    (Paroles de Renaud Séchan, musique de Renaud Séchan et Jean-Pierre Bucolo)

Bon d’accord, j’ai triché,
J’ai r’posé l’W discrèt’ment.
J’savais pas où l’placer,
J’pensais pas qu’tu m’voyais
sincèrement.
On annule la partie,
si tu veux on l’oublie,
on l’efface.
J’ai quatre cents points d’avance,
Et ça c’est pas d’la chance,
c’est la classe.

Mais si t’es mon pote,
tu m’laisses tricher un scrabble,
tu ramènes pas ta gueule
quand tu m’vois magouiller.
Moi je veux juste gagner,
ça m’amuse pas de jouer,
si t’es mon pote : tu t’tais !

Bon d’accord, il est tard,
pi t’en as un peu marre
des bistrots.
T’as beau boire comme un trou,
T’arrives pas à être saoul,
t’as pas d’pot.
Mais faut pas m’planter là,
Moi j’suis fait comme un rat,
allumé.
Je m’en fous, arrache-toi,
La tournée c’est pour moi,
enfoiré !

Mais si t’es mon pote,
Tu m’laisses pas boire tout seul,
et tu m’fais pas la gueule
Quand tu m’vois délirer.
J’t’offre un verre chez Ali
le dernier, c’est promis,
si t’es mon pote : tu m’suis !

Bon, d’accord, elle est bonne,
Mais j’vois pas c’qu’elle te donne
De plus que moi.
Des s’maines que tu m’délaisses
Pour une histoire de fesses,
J’le crois pas !
Fais gaffe que l’amitié
Se laisse pas enterrer
Par cette peste
Qu’est jalouse comme un pou
Qui t’connaît pas du tout,
Et qui m’déteste.

Mais si t’es mon pote,
T’avoues qu’c’est un peu la crainte,
C’est pas franch’ment une sainte,
C’est pas Christine Ockrent.
Pi elle a l’intellect
Plutôt près d’la moquette,
Si t’es mon pote : tu jettes !

Bon, d’accord, j’suis taré,
frimeur comme une voiture
de pompiers.
C’est qu’j’ai été bercé
un peu trop près du mur
tout bébé.
Mais faut tout m’pardonner,
parc’que d’main j’peux crever,
c’est la vie
Jamais tu t’en r’mettrais
et qu’est c’qui t’resterait
comme ami ?

Mais si t’es mon pote,
tu meurs un peu avant moi
J’te promets qu’toutes les s’maines,
t’auras des chrysanthèmes.
Mais tant qu’je suis là,
n’oublie pas que j’t’aime
et que si t’es mon pote : tu m’aimes !
Si t’es mon pote : tu n’aimes
Que moi !

4. Mistral gagnant
    (Renaud Séchan)

A m’asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Et regarder les gens tant qu’y en a
Te parler du bon temps qu’est mort ou qui r’viendra
En serrant dans ma main tes p’tits doigts
Pi donner à bouffer à des pigeons idiots
Leur filer des coups d’pied pour de faux
Et entendre ton rire qui lézarde les murs
Qui sait surtout guérir mes blessures
Te raconter un peu comment j’étais, mino
Les bombecs fabuleux qu’on piquait chez l’marchand
Car-en-sac et Mintho caramels à un franc

Et les Mistral gagnants

A marcher sous la pluie cinq minutes avec toi
Et regarder la vie tant qu’y en a
Te raconter la terre en te bouffant des yeux
Te parler de ta mère un p’tit peu
Et sauter dans les flaques pour la faire râler
Bousiller nos godasses et s’marrer
Et entendre ton rire comme on entend la mer

S’arrêter, repartir en arrière
Te raconter surtout les carambars d’antan et les coco-boers
Et les vrais roudoudous qui nous coupaient les lèvres et nous niquaient les dents

Et les Mistral gagnants

A m’asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Regarder le soleil qui s’en va
Te parler du bon temps qu’est mort et je m’en fous
Te dire que les méchants c’est pas nous
Que si moi je suis barge ce n’est que de tes yeux
Car ils ont l’avantage d’être deux
Et entendre ton rire s’envoler aussi haut
Que s’envolent les cris des oiseaux
Te raconter enfin qu’il faut aimer la vie et l’aimer même si
Le temps est assassin et emporte avec lui
Les rires des enfants et les mistral gagnants

Et les mistral gagnants

    Pour en connaître davantage sur les « bonbecs » de la chanson, c’est par ici !

5. Trois Matelots
    (Renaud Séchan)

Nous étions trois jeunes matelots
Trois beaux marins grands et costauds
Embarqués un jour à Toulon
Sans uniformes et sans galons
Sur le porte-avions Clémenceau

Nous étions trois jeunes militaires
Pas trop amoureux de la guerre
Mais nous voulions bien nous faire tondre
En échange d’un tour du monde
Sur un joli bateau en fer

Le premier de ces matelots
Etait Breton jusqu’au mégot
Mais il était con comme un manche
Comme un déjeuner du dimanche
Comme un article du Figaro

L’avait grandi au bord de l’eau
Mais n’en avait jamais bu trop
A quinze ans pour une donzelle

Il a déserté La Rochelle
Pour les remparts de Saint-Malo

Rue de la Soif on le vit beau
A écumer tous les tripots
Et lorsque s’en venait l’aurore
Roulait de babord à tribord
Et s’échouait dans le ruisseau

Voulut partir sur un bateau
Goûter un peu de sirocco
En pensant avec raison
Que l’océan rendait moins con
Mais pour lui y’avait du boulot

Dieu qu’elle est belle
L’histoire des trois matelots
Presque aussi belle
Que l’pont du Clémenceau

Le deuxième de ces matelots
Etait corse dans toute sa peau
Il était méchant comme la tourmente
Vicieux comme une déferlante
Comme un article de Jean Cau

L’avait grandi au bord de l’eau
Mais n’en buvait que dans l’Pernod
A quinze ans par un légionnaire
S’est fait tailler une boutonnière
Près d’la citadelle d’Ajaccio

L’est devenu un vrai salaud
S’est fait tatouer les biscottos
Entre le prénom de sa mère
Des loups des serpents des panthères
Et le Christ au milieu du dos

Voulut partir sur un bateau
Pour ne jamais vivre comme un veau
Et pour faire voyager sa haine
De cette putain de race humaine
Peuplée de rats et de blaireaux

Dieu qu’elle est longue
L’histoire des trois matelots
Presque aussi longue
Que l’pont du Clémenceau

Le dernier de ces matelots
C’était moi, j’étais Parigot
J’étais bon comme la romaine
Rusé malin comme une hyène
Musclé comme un flan aux pruneaux

J’avais grandi très loin de l’eau
J’en buvais autant qu’un moineau
A quinze ans j’ai quitté Paname
Pour chasser d’mon cœur une femme
Qui voulait y faire son berceau

J’ai bourlingué comme un clodo
J’ai rencontré des écolos
Qui m’ont dit : va voir les baleines
Qui vivent dans les eaux lointaines
Tu verras que ce monde est beau

Voulus partir sur un bateau
Pour voir la terre d’un peu plus haut
Doubler l’Cap Horn dans les deux sens
Et voyager de Recouvrance
Jusqu’aux bordels de Macao

Dieu qu’elle est dure
L’histoire des trois matelots
Presque aussi dure
Que l’pont du Clémenceau

Le premier de ces matelots
Qui était con comme un drapeau
Il a fini plein de galons
Plein de sardines sur son veston
Et plein de merde sous son calot

Le deuxième de ces matelots
Qui était méchant comme un corbeau
Il a fini dans une vitrine
Au ministère de la Marine
Petit chef derrière un bureau

Le dernier de ces matelots
S’est fait virer de son bateau
Pour avoir offert son pompon
A une trop jolie Ninon
Contre un baiser sucré et chaud

Si votre enfant est un salaud
Un vrai connard, une tête pleine d’eau
Faites-en donc un militaire
Alors il fera carrière
Sur un navire, dans un bureau

Mais s’il est bon, mais s’il est beau
Même s’il est un peu alcoolo
Qu’il fasse son tour de la terre
Tout seul sur un bateau en fer
Mais pas sur l’pont du Clémenceau

Simple soldat, brave matelot
Surtout ne m’en veuillez pas trop
Cette chanson je ne l’ai chantée
Que pour les planqués, les gradés
Les abonnés du Figaro

6. Tu vas au bal ?
    (Renaud Séchan)

Tu vas au bal ? – qu’y m’dit
J’lui dit : qui ? – y m’dit toi
J’lui dit : moi ? – y m’dit oui
J’lui dit : non, je peux pas
C’est trop loin – y m’dit bon

Et toi, t’y vas ? – qu’j’ui dit
Y m’dit qui ? – j’ui dit toi
Y m’dit moi ? – j’ui dit oui
Y m’dit non, j’y vais pas
J’ai un rhume et j’ai froid

Alors on n’a pas dansé
On est resté à parler
On n’a rien regretté
Y paraît d’toute façon
que c’était un bal con

Tu vas aux putes ? – qu’y m’dit
J’lui dit : qui ? – y m’dit toi
J’lui dit : moi ? – y m’dit oui

J’lui dit : non, je ne peux pas
C’est trop loin – y m’dit bon

Et toi, t’y vas ? – qu’j’ui dit
Y m’dit qui ? – j’ui dit toi
Y m’dit moi ? – j’ui dit oui
Y m’dit non, j’y vais pas
J’ai malade et j’ai froid

Alors on n’a pas baisé
On est resté à parler
On n’a rien regretté
On n’avait pas d’argent
Pi y paraît qu’c’est payant

Tu vas à l’église ? – qu’y m’dit
J’lui dit : qui ? – y m’dit toi
J’lui dit ; moi ? – y m’dit oui
J’lui dit : non, je veux pas
C’est trop loin, j’t’ai déjà dit, y m’dit bon

Et toi, t’y vas ? – qu’j’ui dit
Y m’dit qui ? – j’ui dit toi
Y m’dit moi ? – j’ui dit oui
Y m’dit non, j’y vais pas
Y fait froid et j’ai froid

Alors on n’a pas prié
On est restés à parler
On n’a rien regretté
Car nos âmes sont tordues
Pour pêcher c’est le pied

Mon pote est mort de froid
D’toute façon y m’gonflait
Voulait jamais bouger
Y savait que poser
Des questions un peu con (comme vous)

Alors j’l’ai enterré
Pi j’suis allé danser
Avec les putes du quartier
Dans l’église ravagée
Et j’ai rien regretté
Mais alors rien du tout !

7. Morts les enfants
    (Paroles de Renaud Séchan, musique de Franck Langolff)

Chiffon imbibé d’essence
Un enfant meurt en silence
Sur le trottoir de Bogota
On ne s’arrête pas

Déchiquetés au champs de mines
Décimés aux premières lignes
Morts les enfants de la guerre
Pour les idées de leurs pères

Bal à l’ambassade
Quelques vieux malades
Imbéciles et grabataires
Se partagent l’univers

Morts les enfants de Bophal
D’industrie occidentale
Partis dans les eaux du Gange
Les avocats s’arrangent

Morts les enfants de la haine
Près de nous ou plus lointaine
Morts les enfants de la peur
Chevrotine dans le cœur

Bal à l’ambassade
Quelques vieux malades
Imbéciles et militaires
Se partagent l’univers

Morts les enfants du Sahel
On accuse le soleil
Morts les enfants de Seveso
Morts les arbres, les oiseaux

Morts les enfants de la route
Dernier week-end du mois d’août
Papa picolait sans doute
Deux ou trois verres, quelques gouttes

Bal à l’ambassade
Quelques vieux malades
Imbéciles et tortionnaires
Se partagent l’univers

Mort l’enfant qui vivait en moi
Qui voyait en ce monde-là
Un jardin, une rivière
Et des hommes plutôt frères

Le jardin est une jungle
Les hommes sont devenus dingues
La rivière charrie des larmes
Un jour l’enfant prend une arme

Balles sur l’ambassade
Attentat, grenade
Hécatombe au ministère
Sous les gravats, les grabataires

8. Baby-sitting blues
    (Renaud Séchan)

Samedi soir, on est d’virée
on a confié la gamine
à la gonzesse d’à côté
la voisine

On lui a dit : tu peux manger
y’a des œufs dans l’frigidaire
tu peux r’garder la télé
y’a Drucker

Réponds pas au téléphone
sauf si on te téléphone
pis surtout t’ouvres à personne
si on sonne

Si la p’tite elle fait la foire
tu lui racontes une histoire
si elle a soif, tu la fais boire
mais pas trop

Baby sitting blues,baby-sitting blues
c’est l’blues de maman-papa
qui s’en vont pis qu’assument pas
c’est l’blues de papa-maman
le feu à l’appartement
ceci, cela

La voisine est étudiante
mais elle est quand même gentille
elle prépare une thèse sur Kant
elle m’la f’ra lire

Elle a monté ses affaires
ses lunettes et son cartable
posé son gros dictionnaire
sur la table

Y’avait pas beaucoup d’images
la gamine a pas ai-me lui a arraché
toutes les pages
sans s’presser

C’était plutôt mal barré
entre la grande et la petite
z’étaient pas vraiment branchées
sur l’mêm’ trip

Baby-sitting blues,baby-sitting blues
c’est l’blues de maman-papa
qui s’en vont pis qu’assument pas
c’est l’blues de papa maman
qui s’emmerdent au restaurant
puis ça s’voit

La p’tite a voulu manger
l’étudiante lui dit : Bon,
j’vais t’préparer une purée
au jambon

Ma fille a dit : L’a du gras
a foutu l’assiette par terre
*c’est normal, elle aime pas l’gras
elle aime que son père

Ta purée elle est caca
je veux une omelette aux oeufs
et un grand verre de Coca
ou même deux

L’baby-sitter, excédée,
lui r’file un Choco BN
un yahourt pas très sucré
pi une beigne

Baby-sitting blues,baby-sitting blues
c’est l’blues de maman-papa
qui s’en vont pis qu’assument pas
c’est l’blues de papa-maman
qui balisent en attendant
la fin du r’pas

La grande va bientôt craquer
déjà elle veut plus d’enfants
s’écroule devant la télé
pas longtemps

Ma gamine arrive en pleurs
veut voir une cassette maint’nant
celle des schtroumpfs et d’leur bonheur écoeureant
Pi qu’après on lui raconte
une histoire où y’à des loups
une princesse et puis un monstre
et c’est tout

La baby-sitter veut bien
mais seulement après Drucker
la gamine y colle un pain
par-derrière

Baby-sitting blues,baby-sitting blues
c’est l’blues de maman-papa
qui s’en vont pis qu’assument pas
c’est l’blues de papa-maman
qui s’demandent si en rentrant
ça ira

Sam’di soir, ça a baigné
On a paniqué pour rien
La p’tite avait assuré
plutôt bien

Elle bouquinait dans sa piaule
« La Critique de la raison pure »
Trouvait ça presque aussi drôle
Que Ben Hur

La grande dormait comme un veau
L’a fallu la réveiller
En lui jetant des seaux d’eau
Bien glacés

L’est partie en titubant
Pis ça m’a coûté dix sacs
Les baby-sitters maint’nant
Quelle arnaque

Baby-sitting blues,baby-sitting blues
c’est l’blues de maman-papa
qui s’en vont pis qu’assument pas
c’est l’blues de papa-maman
le feu à l’appartement
ceci, cela

9. P’tite Conne
    (Renaud Séchan)

Tu m’excus’ras, mignonne
D’avoir pas pu marcher
Derrière les couronnes
De tes amis branchés

Parc’que ton dealer
était peut-être là
Parmi ces gens en pleurs
qui parlaient que de toi

En regardant leurs montres,
en se plaignant du froid,
En assumant la honte
de t’avoir poussée là

P’tite conne
tu leur en veux même pas
Tu sais que ces charognes
sont bien plus morts que toi

Tu fréquentais un monde
d’imbéciles mondains
Où cette poudre immonde
se consomme au matin,

Où le fric autorise
à se croire à l’abri
Et de la cour d’assises
et de notre mépris

Que ton triste univers
nous inspirait, malins
en sirotant nos bières
ou en fumant nos joints…

P’tite conne
tu rêvais de Byzance
Mais c’était la Pologne
jusque dans tes silences…

On se connaissait pas
Aussi tu me pardonnes
J’ai pas chialé quand t’as
Cassé ta pipe d’opium

J’ai pensé à l’enfer
D’un téléphone qui crie
Pour réveiller ta mère
Au milieu de la nuit.

J’aurais voulu lui dire
Que c’était pas ta faute
Qu’à pas vouloir vieillir
On meurt avant les autres…

P’tite conne
Tu voulais pas mûrir,
Tu tombes avant l’automne
Juste avant de fleurir…

Mais t’aurais-je connue
Que ça n’eût rien changé,
Petite enfant perdue
M’aurais-tu accepté ?

Moi j’aime le soleil
Tout autant que la pluie
Et quand je me réveille
Et que je suis en vie

C’est tout ce qui m’importe
Bien plus que le bonheur
Qui est affaire de médiocres
Et qui use le cœur…

P’tite conne
C’est oublier que toi
T’étais là pour personne
Et qu’personne était là…

Tu m’excus’ras, mignonne
D’avoir pas pu pleurer
En suivant les couronnes
De tes amis branchés,

Parce que ton dealer
Etait, peut-être là
A respirer ces fleurs
Que tu n’aimerais pas,

A recompter ces roses
Qu’il a payées au prix
De ta dernière dose
Et de ton dernier cri…

P’tite conne
Allez, repose-toi
Tout près de Morrison
Et pas trop loin de moi

P’tite conne
Allez, repose-toi
Tout près de Morrison
Et pas trop loin de moi… 

10. Le Retour de la Pépette
    (Renaud Séchan)

Y’en a une qu’est vach’ment impatiente
C’est la Pépette qui part en vacances
Demain elle s’en va planter sa tente
Sur une plage au bord de la France

Elle prépare ses affaires énervée
Elle s’agite elle s’affaire elle panique
Depuis le temps qu’elle est paniquée
Elle rêve d’un grand amour exotique

Elle a pris un cache-col un chandail
Sa robe jaune un p’tit peu déchirée
Un poisson surgelé des tenailes
Sa valise en carton va craquer

Elle est quand même heureuse d’être contente
L’a réussi à plier sa tente…

Premier jour de vacances infernal
La Pépette a voulu s’éclater
Elle a pris une leçon d’planche à voile

Même la planche a failli se noyer

Pépette a bu la moitié d’la mer
Pis elle s’est fait mal à le genoux
Et tout le pétrole du Finistère
A fini dans ses grands cheveux mous

Elle est allée s’doucher au camping
Pis elle a commencé à flipper
à cause des marques blanches sous son string
Pis du reste de sa peau toute brûlée

L’est quand même furieuse d’être en colère
y’a moins d’risques avec le nucléaire…
(couplet intéressant)

Elle se oint elle s’enduit elle s’pommade
De Monoï et de crème Nivéa
Elle veut pas qu’son p’tit corps se dégrade
Car ce soir elle va au Macumba

Une giclée d’Opium pour sentir bon
Sur la nuque et puis derrière les bras
Un coup d’brosse pour refaire son chignon
Elle est prête à tomber Travolta

Elle hésite la robe jaune l’écossaise
Les collants les chaussettes ou les bas
Qu’est-c’qui s’ra l’plus pratique si elle baise
Qu’est-c’qui f’ra flipper les autres nanas

L’est quand même étonnée d’être surprise
Devant la contenance de sa valise…

Finalment elle se fringue en Pépette
En Madone des machines agricoles
Au bout d’cinq heures elle est enfin prête
Mais la boîte est fermée manque de bol

Alors elle va s’manger une pizza
Au jambon et au centre commercial
Et elle sanglote en pensant à moi
Ce qui est complètement immoral

Un troufion qui arrosait la quille
Vient lui faire un compliment grotesque
Genre vous êtes belle comme quéqu’chose qui brille
Elle en tombe amoureuse aussi sec

L’est quand même déçue d’être triste
D’pas tomber sur un parachutiste…
(couplet euh … pathétique)

Y s’font dévorer par les moustiques
Toute la nuit sous la tente sur la plage
Au main y s’font un p’tit pique-nique
Un sandwich aux fourmis et fromage

Alors avec un bâton en bois
Y’z’écrivent leurs prénoms sur le sable
Elle dessine un cœur et lui un foie
Pis y r’gardent l’horizon lamentable

Elle va lui chercher des cigarettes
Au village dix bornes à pied c’est long
Quand elle revient il a fait basket
En lui gaulant sa valise en carton

Dedans y’avait ses robes et ses sous
Ses papiers des tenailles un poisson
Ses vacances sont foutues pour de bon
L’avait qu’à faire un peu attention
Et c’est tout…

11. Fatigué
    (Paroles de Renaud Séchan, musique de Franck Langolff)

Jamais une statue ne sera assez grande
Pour dépasser la cime du moindre peuplier
Et les arbres ont le cœur infiniment plus tendre
Que celui des hommes qui les ont plantés

Pour toucher la sagesse qui ne viendra jamais
J’échangerais la sève du premier olivier
Contre mon sang impur d’être civilisé
Responsable anonyme de tout le sang versé

Fatigué, fatigué
Fatigué du mensonge et de la vérité
Que je croyais si belle, que je voulais aimer
Et qui est si cruelle que je m’y suis brûlé
Fatigué, fatigué

Fatigué d’habiter sur la planète terre
Sur ce grain de poussière, sur ce caillou minable
Sur cette fausse étoile perdue dans l’univers
Berceau de la bêtise et royaume du mal

Où la plus évoluée parmi les créatures
A inventé la haine, le racisme et la guerre
Et le pouvoir maudit qui corrompt les plus purs
Et amène le sage à cracher sur son frère

Fatigué, fatigué
Fatigué de parler, fatigué de me taire
Quand on blesse un enfant quand on viole sa mère
Quand la moitié du monde en assassine un tiers
Fatigué, fatigué

Fatigué de ces hommes qui ont tué les Indiens
Massacré les baleines et bâillonné la vie,
Exterminé les loups, mis des colliers aux chiens
Qui ont même réussi à pourrir la pluie

La liste est bien trop longue de tout ce qui m’écœure
Depuis l’horreur banale du moindre fait divers
Il n’y a plus assez de place dans mon cœur
Pour loger la révolte, le dégoût, la colère

Fatigué, fatigué
Fatigué d’espérer et fatigué de croire
A ces idées brandies comme des étendards
Et pour lesquelles tant d’hommes ont connu l’abattoir
Fatigué, fatigué

Je voudrais être un arbre, boire l’eau des orages
Me nourrir de la terre, être ami des oiseaux,
Et puis avoir la tête si haut dans les nuages
Qu’aucun homme ne puisse y planter un drapeau

Je voudrais être un arbre et plonger mes racines
Au cœur de cette terre que j’aime tellement
Et que ce putain d’homme chaque jour assassine
Je voudrais le silence enfin, et puis le vent…

Fatigué, fatigué
Fatigué de haïr et fatigué d’aimer
Surtout ne plus rien dire, ne plus jamais crier
Fatigué des discours, des paroles sacrées
Fatigué, fatigué

Fatigué de sourire, fatigué de pleurer
Fatigué de chercher quelques traces d’amour
Dans l’océan de boue où sombre la pensée
Fatigué, fatigué

Crédits de l’album

 

Sources : Paroles.net et Wikipédia.fr